La Journée internationale de sensibilisation à l’autisme a été l’occasion de mettre en avant les progrès réalisés dans l’identification d’étiologies organiques, notamment génétiques, pour certains troubles du spectre autistique (TSA). Un argument pour explorer de façon plus systématique les patients, estiment certains chercheurs.
À quoi est dû l’autisme ? Même si la question est loin d’être résolue et que le processus est sûrement multifactoriel, les connaissances sur le sujet avancent peu à peu. « Quand on y met les moyens, on parvient aujourd’hui à trouver une explication pour 30 % des formes les plus sévères, syndromiques, avec déficit intellectuel, d’autisme », estime le pédiatre et généticien Arnold Munnich (Paris).
Plusieurs centaines de gènes identifiés
Un chiffre relativement encourageant, atteint d’abord grâce aux progrès de la génétique, voire de la génomique. Selon l’institut des maladies génétiques Imagine (Paris), « plusieurs centaines de gènes », impliqués en particulier dans la mobilité cellulaire, la projection cellulaire (formation des axones), la synaptogenèse ou encore la signalisation intercellulaire ont déjà été identifiés. « On peut aujourd’hui proposer aux enfants et aux familles de séquencer des gènes connus pour être impliqués dans des formes graves d’autisme », explique le Pr Munnich. Quand aucune cause monogénique ne saurait être mise en évidence, il serait en outre parfois possible de faire bénéficier les jeunes patients et leurs parents d’un séquençage du génome entier visant à trouver des facteurs de risque polygénique. « Même si ces études du génome complet concernent encore la recherche et ne constituent pas un standard exigible à l’heure actuelle, c’est ce vers quoi on se dirige », se félicite le généticien Stanislas Lyonnet (Paris).
Au cours de ces dernières années, les progrès de l’imagerie ont aussi permis d’objectiver certaines anomalies organiques sous-jacentes. « Dans 40 % des cas syndromiques et déficitaires, on parvient par exemple, en IRM, à visualiser des anomalies très nettes du débit sanguin dans le lobe temporal, au sein de l’aire connue pour contrôler les interactions sociales », souligne le Pr Munnich.
Vers des investigations plus systématiques ?
Selon le généticien, des études épidémiologiques auraient par ailleurs permis de pointer, outre le rôle de la génétique, l’implication éventuelle de facteurs environnementaux, en particulier de l’exposition à certains toxiques – comme la Dépakine®, la progestérone administrée à forte dose pendant la grossesse, la cocaïne ou d’autres stupéfiants –, voire de la PMA, des grossesses difficiles (éclampsie, prématurité, etc.) ou encore d’anomalies métaboliques, immunitaires ou microbiologiques.
Au total, au regard des technologies et des connaissances qui se développent, « on ne peut plus se permettre de ne pas conduire ou faire conduire, en 2021, des investigations d’imagerie cérébrale et de génétique pour des enfants qui présentent un trouble du spectre autistique », juge le Pr Lyonnet. L’enjeu de ces explorations : faire avancer encore les frontières du diagnostic, la recherche (fondamentale mais aussi clinique) et apporter un conseil génétique aux couples, mais pas seulement. « Donner des explications et des éléments pour penser, c’est déjà soigner », affirme le Pr Munnich. Selon son confrère Stanislas Lyonnet, en effet, « proposer une explication qui n’est d’ailleurs pas immobile, figée, c’est proposer une prise en charge allégée du poids que représente l’incertitude, souvent meublée de fantasmes et de culpabilité ».
Pour ce faire, reste à lutter contre des théories alternatives et notamment psychanalytiques qui persistent, mais aussi à améliorer l’accès aux consultations de génétique et de neuropédiatrie. « Il faut parfois des années pour obtenir un rendez-vous à l’hôpital, par ailleurs peu adapté à l’accueil d’enfants autistes », admet le Pr Munnich. Un espoir siège cependant dans des initiatives originales qui se développent, à l’instar, de la consultation mobile conjointe de génétique et de psychiatrie mise en place à l’Institut Imagine, en collaboration avec la fondation "L’Elan Retrouvé"et financée par l’ARS Île-de-France. « Au lieu d’imposer une visite à l’hôpital Necker, c’est nous qui nous déplaçons pour proposer un bilan standard avec arbre généalogique et proposer un regard organique sur la réalité du trouble », raconte le Pr Munnich, qui a conçu ce dispositif.
Pas de révolution dans le domaine des traitements
« Une des difficultés principales de la prise en charge de l’autisme, c’est qu’aucune thérapie pharmacologique efficace n’est encore disponible », rappelle Arnold Munnich. Or, sur le front des traitements, rien n’apparaît très nouveau ou très utilisable en routine à l’heure actuelle. S’il existe des médicaments pour la prise en charge de certaines comorbidités, les diurétiques, les transplantations fécales, voire les immunomodulateurs testés contre certains TSA n’ont pas encore dépassé le cadre de la recherche. Pour trouver des approches pharmacologiques pertinentes, celle-ci doit d’abord finir de « démembrer » les TSA par étiologies, estime le généticien. En attendant, les interventions resstent essentiellment pédagogiques ou centrées sur le comportement, le développement, etc...
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