Le cannabis et ses dérivés peuvent-ils soulager les personnes atteintes de certaines maladies mentales comme la dépression ou la psychose? En l'état actuel de la recherche, ce bénéfice n'est pas démontré, répond une étude australienne publiée lundi dans le Lancet Psychiatry.
Alors qu'un nombre croissant de pays légalisent le cannabis thérapeutique, les preuves en faveur d'un impact positif chez des patients souffrant de troubles mentaux sont "limitées" et "insuffisantes" pour justifier une recommandation par les autorités de santé, estiment les chercheurs.
Pour aboutir à cette conclusion, ils ont passé au crible 83 études portant sur l'usage du cannabis ou de ses substances actives, le tétrahydrocannabinol (THC) et le cannabidiol (CBD), chez des patients atteints de six troubles neuro-psychiatriques : dépression, trouble anxieux, trouble de déficit de l'attention/hyperactivité (TDAH), syndrome de la Tourette, syndrome de stress post-traumatique et psychose.
Quelques études montrent "une petite amélioration des symptômes d'anxiété" avec le THC chez des patients souffrant d'un autre problème de santé, comme une douleur chronique ou la sclérose en plaques, mais sans que l'on puisse déterminer si l'effet n'est pas lié à une amélioration de la maladie elle-même.
Une trentaine de pays dans le monde autorise, à différents niveaux, le cannabis thérapeutique (une vingtaine de pays européens, les États-Unis, l'Australie, le Canada, Israël, plusieurs pays d'Amérique latine…). Et, selon l'étude, les troubles mentaux sont l'une des raisons les plus fréquentes de cet usage, après les douleurs chroniques non cancéreuses.
"L'un des aspects les plus frappants" avec cette vague de légalisation des cannabinoïdes pour des usages médicaux "c'est que dans de nombreux cas cela se passe en dehors des autorités de régulation habituellement chargées de contrôler le développement des médicaments", souligne Louisa Degenhardt, auteure principale de l'étude. Dans le même temps, les risques liés à la consommation de cannabis sont eux avérés, ajoute-t-elle, citant les risques de dépendance, ceux liés à la conduite sous l'emprise de ces substances et "des données montrant que les personnes consommant régulièrement du cannabis ont davantage de risques de développer une dépression ou des sympyomes psychotiques".
Les auteurs pointent le besoin de mener davantage d'études de qualité sur le sujet, notamment sur un plus grand nombre de patients, en les suivant plus longtemps et en comparant les effets avec un groupe recevant un placebo.
D'ici là, "on ne peut pas élaborer de recommandations médicales concernant leur usage dans les troubles mentaux", estime la Pr Degenhardt.
Et dans les pays où cet usage est déjà légal, "les médecins et les patients doivent être informés du niveau limité des preuves existantes et des risques des cannabinoïdes", ajoute la scientifique.
En France, le PLFSS vient d'entériner le principe d'une expérimentation du cannabis thérapeutique, suite à l'amendement déposé par le député LREM de l'Isère Olivier Véran, mais seulement pour le traitement de la douleur dans certaines indications bien précises et en cas d'échec des médicaments existants.
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