Dans une tribune publiée dans Le Parisien, 51 médecins, représentants de sociétés savantes et d'associations réclament « la publication du décret dans les plus brefs délais » pour pouvoir proposer de façon expérimentale des traitements à base de cannabis thérapeutique « dès le premier trimestre 2021 » à certains patients. Parmi les signataires, il y a des membres du Comité scientifique (Csst) mis en place par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
Après les différents travaux mis en place par l'ANSM pour avancer dans ce projet (identification des pathologies à traiter pour quelque 3 000 patients ; produits utilisés...), tout semblait prêt sur le papier pour démarrer cette expérimentation. Pourtant en juin dernier, l'ANSM avait indiqué qu'en raison de l'épidémie de la Covid, cette expérimentation était reportée à janvier 2021.
Tournure politique
Aujourd'hui, les choses prennent une tournure politique, les signataires de cette tribune s'interrogeant sur le réel désir de lancer cette expérimentation, faute de publication du décret d'application nécessaire à son démarrage. « Les patients et les professionnels de santé commencent à émettre des doutes sur la volonté politique de mettre réellement en place l'accès au cannabis médical », explique à l'AFP le psychiatre et pharmacologue Nicolas Authier, président du Comité scientifique temporaire chargé de superviser l'expérimentation. « Cela engendre de l'anxiété chez les patients, les médecins ne savent plus quoi leur répondre ».
« Ce qui bloque, c'est la volonté politique », explique Bertrand Rambaud, président de l'association Alternative cannabis thérapeutique (ACT), qui pointe « la peur des politiques de voir le cannabis médical être le premier pas d'une légalisation du cannabis récréatif », alors que le gouvernement vient de prendre des initiatives dans la lutte contre la consommation de certaines substances illicites.
« C'est de la non-assistance à personne en douleur », selon Marie-Madeleine Gilanton, à la tête de l'association Apaiser, qui représente 7 000 patients atteints de syringomyélie ou d'une malformation de Chiari, pour qui le cannabis thérapeutique représenterait un espoir. « Désespérés », certains « demandent à leurs petits-enfants d'aller chercher du cannabis pour eux », a-t-elle raconté mercredi lors d'une conférence de presse à Paris.
Bientôt la publication du décret assure la DGS
Contactée, la Direction générale de la santé (DGS) assure que le décret devrait être publié en septembre. Le Conseil d'État « vient d'être saisi » pour validation et « le début de l'expérimentation est toujours prévu pour janvier », assure-t-elle.
« Même si le décret était publié en septembre, je ne suis pas sûr qu'on arrivera à commencer en janvier », doute Nicolas Authier. La production de cannabis étant interdite en France, l'ANSM ne disposerait que de quatre mois pour lancer les appels d'offres, sélectionner des fournisseurs étrangers puis importer leurs médicaments.
Des importations contre lesquelles s'insurgent de nombreux agriculteurs. Ils réclament le feu vert du gouvernement à une filière française, autre facteur susceptible de repousser les arbitrages.
Dernier problème, l'expérimentation, qui nécessiterait entre 25 et 30 millions d'euros, n'a reçu aucune dotation budgétaire propre, contrairement au projet validé par l'Assemblée nationale. Conséquence, « la formation va se limiter à quelques centaines de médecins, alors qu'on aurait pu former des milliers de professionnels de santé », explique Nicolas Authier.
Avec l'AFP
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