Afin d’élargir et de faciliter l’accès au dépistage du sida, le Ministère de la Santé a autorisé la commercialisation des autotests de dépistage du VIH en officine (Autotest VIH®). Fabriqués en France par la société AAZ, Ils sont disponibles dès aujourd’hui dans les pharmacies où ils sont distribués par les laboratoires Mylan. Leur prix devrait avoisiner les 28 euros.
Ce sont des tests de dépistage rapide pour lesquels le prélèvement et l’interprétation sont effectués directement par l’intéressé. Ils ne nécessitent pas d’instrumentation spécifique. Ils permettent la détection des anticorps anti- VIH-1 et anti-VIH-2 et reposent sur la technique de l’immunochromatographie : le sang au bout du doigt est aspiré par capillarité et entraîne une réaction colorée en 15 minutes.
[[asset:image:7516 {"mode":"small","align":"right","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":[]}]]La fiabilité de ces test est attestée par une étude menée par le Dr Prazuck (chef de service des maladies infectieuses, CHR Orleans) sur 3 sites (CHR Orléans, CHU Poitiers, CH La Rochelle) à la fois sur des patients séropositifs connus et des personnes séronégatives. Selon le Dr Prazuck, 100% des tests se sont révélés positifs chez les personnes atteintes et le test était négatif chez 100% des personnes indemnes. En revanche, chez des personnes très récemment infectées, le test peut être faussement négatif et il existe une fenêtre sérologique de 3 mois suivant le rapport à risque. Dans ce cas, il est impératif de refaire un test après cette fenêtre. C'est tout particulièrement pendant les 6 premières semaines que ce phénomène de « faux négatif » peut survenir. Enfin, tout résultat positif doit être confirmé par un test en laboratoire, afin que le patient soit pris en charge dans le système de soins.
Cibler les 30 000 séropositifs qui s’ignorent
Quelle est la place de ces autotests au sein du dispositif de dépistage du sida ? Selon le Pr Gilles Pialoux, chef du service d’infectiologie de l’hôpital Tenon (Paris), « les personnes réticentes à l’utilisation des méthodes de dépistage classiques - par test Elisa de 4e génération en ville, en laboratoire, en CDAG/CIDIST ou par TROD en milieu communautaire - ou qui ne se font pas dépister alors qu’elles ont des pratiques à risque d’exposition au VIH, représentent la population cible privilégiée de ces tests ». En France, selon les recherches les plus récentes, on évalue à près de 30 000 le nombre de personnes infectées par le VIH qui ignorent leur infection, soit environ 20 % du nombre total de personnes infectées, estimé pour l’année 2010 à 150 000. Réduire la taille de cette épidémie cachée apparaît crucial si l’on considère qu’elle serait aujourd’hui à l’origine, selon différentes estimations, de la moitié à plus des deux tiers des nouvelles contaminations. En outre, encore 15% des personnes découvrent leur séropositivité au stade SIDA. Or, un dépistage aussi tardif est préjudiciable pour la santé des personnes atteintes mais aussi pour la collectivité, en raison des risques de transmission avant le dépistage.
[[asset:image:7511 {"mode":"small","align":"left","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":[]}]]Les autotests constituent ainsi un dispositif additionnel et complémentaire à l’offre existante. Ils vont dans le sens de la politique de dépistage en France, qui admet deux volets : une politique de « rattrapage » justifiant un dépistage une fois en population générale visant l’épidémie cachée et une politique « d’attrapage » permettant d’offrir aux personnes les plus exposées autant de tests de dépistage qu’il le faut. Or, il existe encore de nombreux freins au dépistage, que ce soit dans le cadre d’une démarche volontaire (précarité sociale et économique, estimation biaisée du risque couru, sentiment de ne pas être concerné ...) ou des difficultés liées à l’offre : horaires d’ouverture insuffisants ou inadaptés pour une partie des centres de dépistage, problèmes de qualité de l’accueil et/ou du conseil, maillage territorial rendant l’accès à un centre difficile ...
Comme le soulignait l’association AIDES dès 2013, ces autotests constituent un outil supplémentaire et complémentaire, dont l’utilisation doit être accompagnée par un dispositif spécifique, à la fois en amont du test pour s’assurer de la compréhension des enjeux, des limites et des techniques par l’utilisateur, mais également après le test, pour faciliter le lien vers la confirmation du diagnostic et le soin ou vers un soutien préventif. Dans cet esprit, la HAS a élaboré en avril une liste de questions et réponses pratiques pour accompagner les utilisateurs potentiels d’autotests de dépistage du VIH dans leur démarche de dépistage.
De plus, la mise à disposition d’autotest VIH® s’accompagne d’une information de qualité auprès des utilisateurs, grâce à Sida Info Service qui offrira un accompagnement téléphonique complet proposant aide et orientation, Cette association a développé un référentiel de réponses validé et informatisé et proposera aux personnes qui le souhaitent un accompagnement à l’utilisation des autotests sur Internet par la mise à disposition de vidéos. Les utilisateurs d’autotest auront également à leur disposition sur le site www.autotest-sante.com toutes les informations nécessaires à sa réalisation.
Reste une inconnue. Le prix de 28 euros auquel est proposé ce test ne constituera- t-il pas un frein à son utilisation ? C’est ce que redoutent plusieurs spécialistes. Un premier bilan du dépistage par autotests qui doit être dressé en mars 2016, permettra sans doute de répondre à cette question. On peut noter que de tels tests existent déjà en Angleterre et aux USA, au tarifs respectifs, nettement plus conséquents, de 40 livres (54 euros) et de 40 dollars (35 euros) .
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