« Les patients diabétiques n’ont pas d’équilibre alimentaire et ne font pas d’activité physique. Cela fait naître la maladie, avant de l’entretenir. » Tel fut le premier constat du Dr Gaëlle Perez, généraliste de 30 ans (Argelès-sur-Mer, Pyrénées-Orientales), lorsqu’elle s’est confrontée à la réalité pendant son internat.
Pour y remédier, la jeune femme a élaboré un guide dans le cadre de sa thèse pour lequel elle a été nommée aux Grands Prix 2018 du Généraliste dans la catégorie « formation recherche ». Intitulé « L’activité physique, le diabète et moi », ce guide comprend trois volets pédagogiques attribués aux patients (programme sous forme de points, 15 règles d’or, un calendrier d’activités physiques), et une partie consacrée à la prescription de sport, à destination des praticiens, comprenant entre autres une synthèse des recommandations.
L’ouvrage repose sur un postulat de base : pour les diabétiques, l’approche préventive est prioritaire. « Ceux qui prennent soin d’eux de façon précoce évitent les risques à long terme et s’abstiennent de traitement pendant un bon nombre d’années », affirme la jeune praticienne, qui s’est inspirée de la littérature existante. Elle a élaboré un document ludique, pédagogique, qui tend à apprendre aux malades à se « coacher eux-mêmes », avec un système de points et un seuil hebdomadaire à atteindre.
Le rôle clef du généraliste dans l’éducation thérapeutique
« Un sédentaire perçoit souvent l’activité physique comme une montagne à gravir », explique-t-elle. Le généraliste doit lui faire comprendre que c’est faux : faire du jardinage, pêcher ou repasser, c’est de l’activité physique, et le volume est plus important que l’intensité. Tout ce qui fait bouger le corps fait ainsi gagner des points. La course à pied et le vélo sont les plus fructueux : respectivement 3,5 et 3,3 points en pratique intensive, comparés à une balade (0,8 point) ou à l’activité sexuelle (0,5 point). Le rugby est aussi en bonne place (3,3 points). Pour calculer, on multiplie la durée de l’activité par ce qu’elle vaut en points.
Le Dr Perez estime que le généraliste a un rôle primordial à jouer dans l’éducation thérapeutique de ses patients. Hélas, tout le monde n'en a pas la fibre, et l’expérience est requise pour devenir efficace. Pour amorcer un changement de comportement, l’omnipraticien doit identifier ce que le patient ne sait pas. A-t-il conscience que la sédentarité est le quatrième facteur de risque de décès dans le monde ? Qu’elle est la principale cause de 30 % des infarctus du myocarde ? Le généraliste devra intégrer plusieurs dimensions (sociale, psychologique) et persévérer dans le suivi individuel personnalisé. Dans ce sens, le guide propose un schéma des possibles (voir ci-dessous).
Évaluer le risque cardiovasculaire
Le chemin de la prévention est hélas semé d’embûches. « Les pouvoirs publics freinent des quatre fers car ils imaginent son coût exorbitant. Mais ils ne tiennent pas compte des économies en perspective sur le plus long terme », s’insurge le Dr Perez. Par ailleurs, le temps de consultation est trop restreint, et les généralistes ne sont pas formés la complexité de la prescription de l’activité physique. Ils ont aussi peur d’en prescrire : pratiquée sans précaution, elle pourrait faire courir aux diabétiques un risque cardiaque.
Le guide explique ainsi « quand évaluer le risque cardiovasculaire » et la conduite à tenir en cas de complications. Il propose un algorithme de décision sur la nécessité d’un bilan clinique, avec comme variable le niveau d’activité physique, la pathologie cardiovasculaire/rénale, l’âge du patient, la date du diagnostic et l’intensité désirée de l’activité. « Le risque cardiaque de la sédentarité surpasse celui de l’activité physique », énonce la praticienne.
Le guide est pour l’instant disponible qu’à un nombre restreint d’exemplaires. Le Dr Perez aimerait le voir validé par l’ARS afin d'être en mesure de le diffuser plus largement avec, pourquoi pas, la perspective d’une application smartphone.
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