Trois grands essais (Zuma-1, Juliet et Transcend) dans les lymphomes diffus à grandes cellules B (LDGCB)en rechute ou réfractaire ont permis d’évaluer l’efficacité de deux CAR T-cells, le tisagenlecleucel (Kymriah®, Novartis) et l’axicabtagene ciloleucel (Yescarta®, Gilead). Des réponses tumorales ont été observées chez 52 % à 82 % des patients, avec un taux de réponse complète (RC) de 40 % à 58 %.
Quelles sont les données en vraie vie dans les LDGCB …
« Avec un recul de 2 à 3 ans dans les lymphomes très agressifs, on observe une hétérogénéité de résultats. Nous ne sommes pas dans la situation de la LAL-B. Les lymphomes à grandes cellules B sont constitués de sous-types moléculaires différents, il faut donc s’attendre à des réponses différentes avec ce type de stratégie », explique le Pr Hervé Ghesquières (hôpital Lyon-Sud). Un des écueils est le délai de fabrication des CAR T autologues (actuellement 5 semaines). « Il faut pouvoir les fabriquer plus rapidement, en particulier chez les patients chimio-réfractaires, insiste Hervé Ghesquières. Un deuxième écueil est la grande variabilité de la viabilité des CAR T même si, dans l’étude de Chong et coll., publiée dans Blood en 2019, cette variabilité n’impacte pas le taux de réponse et la survie des patients (médiane de viabilité : 88,6%). »
Le profil d’expansion des CAR T-cells est très différent d’un patient à l’autre. « La méconnaissance des effecteurs immunologiques pose un problème dans le monitoring des patients. » Pour Hervé Ghesquières, les défis actuels sont la gestion des effets secondaires tardifs (cytopénies prolongées, infections, …), une meilleure compréhension des échecs.
Le LYSA (The Lymphoma Study Association) en coordination avec l’EBMT (European Society for Blood and Marrow Transplant Society) met en place un registre CAR T-cells qui devrait aider à interpréter les résultats dans la vie réelle. Un projet de « collections biologiques », initiative de l’institut Carnot Calym et du LYSA, aidera également à mieux comprendre les aspects biologiques.
… et dans les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) chez l’enfant et le jeune adulte ?
Les principaux essais depuis 2015 utilisent des CAR T-cells anti-CD19 de deuxième génération utilisant des molécules de co-stimulation, CD28 ou 4-1BB.
L’expérience française avec le tisagenlecleucel (Kymriah®, n=45 patients injectés) dans les 2 centres de référence, l’hôpital Robert-Debré et l’hôpital Saint-Louis, reproduit les résultats observés dans l’étude Eliana. « Les courbes de survie observées avec un suivi médian assez court de 6,6 mois sont superposables à ceux observés dans l’étude Eliana avec une survie sans événement d’un peu plus de 50% et une survie globale à plus de 80%, à 12 mois, avec des médianes de survie non atteintes », affirme la Dr Marie Emilie Dourthe (hôpital Robert-Debré, Paris).
Le profil des rechutes est pour moitié CD19 positif et l’autre moitié CD19 négatif, « ces derniers patients ont eu une évolution clonale qui explique que malgré la persistance des CAR T-cells, leur maladie n’était plus accessible par les lymphocytes T modifiés. Nous ne savons pas encore dans cette situation s’il faut proposer une deuxième injection de CAR T, réaliser une allogreffe de moelle ou monitorer et surveiller. C’est du cas par cas. Le délai de perte d’aplasie B est une part importante de la décision : si cette perte est relativement tardive, on a moins de risque de rechute à l’issue. Il faut réfléchir à une prise en charge plus protocolaire de ces patients », explique l’hématologue.
Le syndrome de relargage cytokiniques (SRC) est corrélé à la charge tumorale. Dans l’expérience française, un tiers des patients a eu un SRC sévère nécessitant une prise en charge en USI [traitement de première ligne tocilizumab (anticorps anti-IL-6R), traitement de deuxième ligne (siltuximab, corticoïdes, anakinra)] ; la toxicité neurologique est souvent concomitante au SRC, observée dans près d’un tiers voire deux tiers des patients.
« De nouveaux protocoles utilisant cette thérapeutique innovante sont en cours d’évaluation : en première ligne, le protocole CASSIOPEA en phase II en cas de maladie résiduelle positive en fin de consolidation. Le projet de protocole européen pédiatrique propose d’utiliser en première ligne, chez les patients en rechute de haut risque, les CAR-T ou le blinatumomab (anticorps bispécifique anti-CD3-CD19) suivi d’une allogreffe de moelle et, si la maladie est de très haut risque, les CAR-T en première ligne. »
La survenue de rechutes « CD19 négatives » a conduit à élaborer des CARs multispécifiques. Les CAR T-cells allogéniques permettraient, quant à elles, d’avoir à disposition un arsenal thérapeutique adapté à la cible dès le diagnostic.
Les perspectives de développement des CAR T-cells résident désormais dans l’optimisation des techniques dans les leucémies et lymphomes et dans l’extension des domaines d’application aux tumeurs solides de l’enfant et de l’adulte.
D’après un focus « CAR T-cells en ordre de marche » organisé par le Groupe Profession Santé avec le soutien institutionnel des laboratoires Novartis et Gilead.
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