C’est un traitement essentiel qui manque à de nombreux patients depuis de longs mois. Dans un billet de blog publié mardi 28 janvier, le Pr Antoine Pelissolo alerte sur la pénurie de quétiapine. Aussi connu sous le nom de marque Xeroquel, ce médicament est prescrit aux patients souffrant de schizophrénie, de troubles bipolaires ou de dépression. « Ce sont nos patients qui nous remontent les difficultés en consultation », confie au Quotidien le chef de service de psychiatrie de l’Hôpital Henri-Mondor à Créteil (AP-HP).
La quétiapine est commercialisée par le laboratoire français Cheplapharm, ainsi que sous des versions génériques par d'autres groupes. Mais la molécule de base est largement produite par une entreprise grecque, Pharmathen.
La pénurie ne date pas d’hier. D’après le tableau de bord mis à jour quotidiennement par l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM), des premières tensions d’approvisionnement ont été signalées le 26 septembre 2024. Aucun message de remise à disposition du médicament dans les officines n’a depuis été communiqué par l’agence, laissant ainsi croire que la pénurie perdure. « Les tensions se sont même intensifiées ces dernières semaines, confirme Pierre-Olivier Variot, pharmacien à Plombières-les-Dijon et président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (Uspo). Plein de laboratoires produisent ce médicament sous forme de génériques mais aucun ne nous a pour l’instant communiqué de délais avant un retour à la normale ».
La situation semble se généraliser à la France entière : « Cela s’aggrave partout, partout, partout ! », s’alarme le pharmacien. « La pénurie de quétiapine impacte de plus en plus de pharmacies de mon territoire depuis quelques semaines. Il a été nécessaire de changer le traitement antipsychotique de certains de mes patients. D’autres parviennent à trouver le médicament mais en faisant le tour de nombreuses officines », raconte le Dr Guillaume Camelot, psychiatre libéral à Bouliac, près de Bordeaux. D’autres praticiens partagent le même désarroi sur les réseaux sociaux, comme le Dr Hugo Baup, psychiatre au entre hospitalier de Périgueux : « Rupture de stock de quétiapine ici en Dordogne. C’est la cata », a-t-il signalé sur Bluesky le 17 janvier.
Médicament essentiel
La quétiapine figure pourtant sur la liste des médicaments essentiels du ministère de la Santé depuis sa première édition parue en juin 2023, signe qu’il est important de prévenir tout risque de tension d’approvisionnement ou de pénurie dans cette classe de médicaments antipsychotiques.
« D’habitude, on avait des problèmes qui restaient temporaires et on trouvait des solutions de repli. Mais là, cela a l’air durable et nous voulons justement savoir si cela doit durer encore longtemps afin de revoir nos prescriptions », insiste le Pr Pelissolo qui appelle, dans son billet de blog, le ministère de la Santé à réagir. « En psychiatrie, les médicaments sont rarement interchangeables car, même dans la même catégorie, ils ont chacun leurs propriétés pharmacologiques spécifiques », insiste-t-il. Dénonçant un manque de communication des laboratoires commercialisant ces médicaments, le médecin met en avant le risque suicidaire chez des patients qui verraient interrompu leur traitement sous quétiapine.
Dans un communiqué diffusé ce 30 janvier, l’ANSM indique que « les médicaments à base de quétiapine (Xeroquel à libération prolongée (LP) et génériques) font l’objet de fortes tensions d’approvisionnement sur tous les dosages 50 mg LP, 300 mg LP, 400 mg LP en raison d’un problème de production rencontré par le fabricant Pharmathen International, qui produit ce médicament pour plusieurs laboratoires ». L’agence précise qu’un « contingentement quantitatif et l’arrêt des exportations par les grossistes-répartiteurs ont été mis en place ». Pour éviter toute rupture de soin chez les patients, l’ANSM a également sollicité les laboratoires concernés afin « d’identifier quels médicaments à base de quétiapine à libération immédiate (LI, non commercialisés en France) ou à libération prolongée pourraient être importés quel que soit le dosage ». Le recours aux préparations magistrales de quétiapine à libération immédiate en pharmacie est aussi à l’étude.
Les alternatives possibles
L’ANSM invite enfin les médecins à « ne plus initier de traitement à base de quétiapine à libération prolongée, sauf pour les patients présentant un épisode dépressif caractérisé dans le cadre d’un trouble bipolaire ». Pour les autres indications, il est recommandé de choisir des traitements alternatifs. Pour la schizophrénie par exemple, l’alternative de première intention est l’aripiprazole ou l’olanzapine selon l’agence. Ces deux mêmes molécules sont aussi conseillées en tant qu’alternative de première intention pour le traitement des épisodes maniaques modérés à sévères dans les troubles bipolaires. Attention : « Les médicaments contenant de la rispéridone, de la palipéridone, de l’amisulpride et ceux à base de dérivés de valproate (divalproate de sodium et valpromide) font déjà l’objet de tensions d’approvisionnement », alerte l’ANSM. Il est donc recommandé de ne pas les prescrire en alternative à la quétiapine.
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