Depuis 2002, le dépistage néonatal systématique de la mucoviscidose a été généralisé en France, afin de permettre une prise en charge spécialisée et un traitement précoce. Aujourd’hui personne ne conteste le bien-fondé de ce dépistage, renforcé par l’arrivée récente de thérapies protéiques correctrices utilisées dès trois semaines de vie. Cependant, des questions éthiques se posent, comme l’ont souligné plusieurs spécialistes lors des journées parisiennes de pédiatrie (Paris, 7-8 octobre 2016).
Des tests parfois difficiles à interpréter
En effet, l’algorithme de dépistage choisi par la France (dosage de la trypsine, puis en cas de positivité recherche de mutation, suivi le cas échéant du dosage du chlorure par le test à la sueur) repère de nombreux nourrissons hétérozygotes sains ayant un test biochimique TIR positif, une seule mutation identifiée et un test à la sueur normal. Avec 50 % de fonction normale du gène CFTR, ceux-ci n’ont aucun risque de développer la maladie et sont donc inquiétés à tort.
Pour remédier à ce problème, l’algorithme de dépistage devrait être remplacé en 2017-2018 par un autre incluant en première ligne non plus un seul mais deux biomarqueurs avec, en sus de la trypsine, le dosage du polypeptide d’activation pancréatique (PAP) afin de gagner en sensibilité. Cette stratégie (TIR-PAP-ADN) a d’ores et déjà le feu vert de la CNAMTS.
Le second avantage de cette nouvelle approche sera de diviser par 10 environ le nombre de formes frontières ou formes « non conclues ». En effet, le dépistage néonatal conduit à la découverte assez fréquente de cas où il est impossible d’affirmer si l’enfant, aujourd’hui asymptomatique, développera un jour la maladie et dans quelle mesure. Ce sont des enfants ayant un test TIR positif, des mutations identifiées mais un test à la sueur de résultat intermédiaire (entre 30 et 60 mmol/L de chlore). En France, le dépistage néonatal actuel découvre six mucoviscidoses pour une forme non conclue. Or « la plupart des nourrissons ayant des formes non conclues ne développeront jamais la maladie », assure Isabelle Sermet-Gaudelus (Hôpital Necker-Enfants Malades, Paris).
Dès lors faut-il considérer la cohorte extrêmement hétérogène de ces formes non conclues comme de potentielles mucoviscidoses même en l’absence de signes, voire avec des signes discrets et mono-organe ? Certains pays ont tranché dans ce sens, les regroupant sous l’appellation Cystic Fibrosis Screen Positive Inconclusive Diagnosis (CFSPID). À l’opposé, la Société Française de la Mucoviscidose (SFM), dans un souci éthique, vient de choisir de ne pas les étiqueter comme des malades jusqu’à preuve du contraire et en conséquence, de ne pas les traiter. Des études ont en effet montré que la médicalisation de ces enfants, même en précisant qu’il s’agit de formes frontières asymptomatiques, conduit à les stigmatiser.
Le médecin traitant en première ligne
Cette position française place le médecin traitant en première ligne pour le suivi de ces enfants. A charge ainsi pour le généraliste ou le pédiatre de ville de repérer, parmi ces nourrissons initialement asymptomatiques, ceux chez qui une mucovicidose pourrait se révéler au cours du temps. « Dans un souci d’épargner l’enfant et sa famille, le médecin libéral, formé par le CRCM* a un rôle absolument majeur à jouer, insiste le Pr Michel Roussey, en charge du dépistage néonatal en France. Avec notamment une vigilance accrue vis-à-vis de tout signe d’alerte de mucoviscidose : cassure de la courbe staturo-pondérale en dépit d’un bon appétit, respiration sifflante, dyspnée à l’effort ou permanente, quintes de toux persistantes et répétitives, expectorations épaisses, infections pulmonaires ou sinusites à répétition, troubles nutritionnels, selles anormales et diarrhée accompagnées de douleurs abdominales voire de parfois de constipation ».
Il s’agit aussi de conclure avec les parents un compromis d’accès aux soins : s’il apparaît un signe spécifique de la maladie, les parents consulteront le médecin traitant qui adressera éventuellement au CRCM.
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