Comme annoncé à la fin du mois d’août, le gouvernement a lancé hier sa stratégie d’administration de rappels de vaccination anti-Covid-19 dans les Ehpad. S’ouvre ainsi une nouvelle phase de la campagne vaccinale, qui devrait conduire à administrer une 3e dose de vaccin anti-Covid-19 d'abord à 600 000 séniors ne vivant plus à leur domicile et à 5 millions de plus de 65 ans ayant déjà reçu une seconde injection il y a plus de 6 mois, indique l’Agence France Presse (AFP).
Mais si l’Hexagone semble ainsi engagé sur la voie de l'injection d’une dose supplémentaire de vaccin aux individus non immunodéprimés ayant déjà complété leur primo-vaccination, cette 3e dose continue de faire débat dans le monde. Si l’Agence européenne du médicament (EMA) avait déjà pointé la semaine dernière un manque de recul pour la mise en œuvre immédiate de campagnes de rappel, des experts de l’OMS et de la FDA enfoncent le clou. Dans une revue de la littérature publiée hier dans le Lancet, ces scientifiques affirment en effet que les données scientifiques disponibles à l’heure actuelle « ne soutiennent pas les rappels en population générale ».
Les schémas de vaccination actuels encore efficaces
Selon eux, les essais randomisés et les études observationnelles déjà publiés ou pré-publiés confirment que les schémas vaccinaux actuellement recommandés apparaissent « hautement efficaces » contre le Covid-19, en particulier contre ses formes graves. « D'après la moyenne des résultats rapportés dans les études d'observation, la vaccination conserve une efficacité de 95 % contre le Covid-19 grave, qu’il soit dû au variant delta ou au variant alpha, et une efficacité de plus de 80 % contre toute infection causée par ces variants », résume le Lancet.
En outre, pour le moment, ces hauts niveaux de protection ne semblent pas décliner. « Prises dans leur ensemble, les études actuellement disponibles ne fournissent pas de preuve crédible d'une baisse substantielle de la protection contre les formes graves de Covid-19, qui est l'objectif principal de la vaccination », insiste dans un communiqué diffusé par la revue médicale le premier auteur de l’article, Dr Ana-Maria Henao-Restrepo. En fait, si certains travaux ont décrit une chute des niveaux d’anticorps anti-SARS-CoV-2 induits par la vaccination au cours du temps, les experts soulignent que ce phénomène ne doit pas amener à conclure nécessairement à une réduction de l’efficacité des vaccins. « La protection vaccinale contre une maladie grave est médiée non seulement par une réponse humorale, de courte durée pour certains vaccins, mais aussi par un système de mémoire immunitaire et une immunité cellulaire, généralement de plus longue durée », rappellent-ils.
Un rapport bénéfice/risque encore incertain
Mais au-delà de ces données relatives à l’efficacité des vaccins et à leur durabilité, les auteurs de l’article interrogent également le rapport bénéfice/risque collectif d’un éventuel rappel. Et ce en comparaison à la balance bénéfice/risque associée à la primo-vaccination des sujets encore non vaccinés, dans un contexte où les doses manquent encore pour vacciner la totalité de la population mondiale. « Même si un certain gain [d’efficacité] peut finalement être obtenu grâce à ce rappel, cela ne l'emportera pas sur les bénéfices associés au fait de fournir une protection initiale aux personnes non vaccinées », affirme le Dr Henao-Restrepo.
Et pour cause : même dans les populations bien vaccinées, les minorités non vaccinées restent à la fois les plus vulnérables aux formes graves de Covid-19 et les principaux vecteurs de transmission du SARS-CoV-2. « L'approvisionnement limité en vaccins sauvera le plus de vies s'il est mis à la disposition des personnes qui courent un risque […] de maladie grave et n'ont encore reçu aucun vaccin », estime Ana-Maria Henao-Restrepo.
En outre, même sur le plan individuel, la balance bénéfice-risque de ce rappel apparaît encore floue. « Si des rappels doivent finalement être utilisés, il sera nécessaire d'identifier les circonstances spécifiques dans lesquelles leurs avantages directs et indirects sont, dans l'ensemble, clairement bénéfiques », soulignent les auteurs.
Finalement, les auteurs plaident pour la même conduite à tenir vis-à-vis des rappels que l’EMA la semaine dernière : ne pas se précipiter sur ces doses supplémentaires afin de se concentrer sur la primo-vaccination des sujets encore non vaccinés.
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