En France, les admissions à l'hôpital pour infarctus du myocarde ont chuté de 30 % pendant le confinement. C’est ce que suggèrent les travaux menés par des chercheurs français auprès des 21 hôpitaux inclus dans la cohorte nationale d’évaluation de l’infarctus du myocarde (Frenchie).
Dans cette étude publiée par le Lancet le 17 septembre 2020, ces chercheurs affirment en effet que de la même façon que la pandémie de Covid-19 a fait diminuer les hospitalisations pour crise cardiaque de 20 à 50 % dans certains pays tels que les États-Unis, l’Italie ou l’Espagne, en France, le confinement a provoqué une réduction soudaine et significative des admissions pour infarctus aigu du myocarde. Alors que dans les 4 semaines précédant l’entrée de la France en confinement, les hôpitaux étudiés ont admis 686 patients souffrant d’infarctus du myocarde, ces mêmes centres n’ont admis que 481 malades entre le 16 mars et le 12 avril. « [Et ce] alors que les admissions hebdomadaires pour [infarctus] au cours des 4 semaines précédant le confinement ne montraient aucun signe de diminution progressive », est-il précisé dans le Lancet.
Alors que la crainte d'une seconde vague épidémique se précise, ces chercheurs s’interrogent sur les causes d’une telle diminution des hospitalisations.
L’effet de l’isolement et de l’angoisse
Pour expliquer cette chute brutale des admissions en soins intensifs pour infarctus du myocarde pendant le confinement, les auteurs avancent deux principaux arguments.
La diminution du nombre d’hospitalisations ayant été particulièrement marquée chez les patients âgés de plus de 80 ans, le phénomène pourrait d’abord s’expliquer par l’indisponibilité des familles elles aussi confinées, voire des SAMU débordés dans certaines régions : les sujets âgés souffrant d’infarctus du myocarde auraient pu se trouver dans l’incapacité de se déplacer jusqu’aux services d’urgences.
Cependant, la réduction du nombre d’hospitalisations pour crise cardiaque concernant en particulier les types d’infarctus les moins douloureux et ayant été observée même dans les régions de France les moins désorganisées par le covid, les chercheurs retiennent plutôt l’hypothèse d’une réelle renonciation aux soins, sous l’effet de la peur. « L'explication la plus probable est que les patients [âgés, plus vulnérables au SARS-CoV-2 que les jeunes adultes] craignaient d'être emmenés dans des hôpitaux susceptibles de recevoir des patients atteints de covid-19, ou s’inquiétaient d'augmenter la pression sur les médecins et les infirmières en ces temps difficiles », estiment les auteurs. « Ces préoccupations auraient pu être amplifiées par le message général selon lequel les gens devaient rester à la maison », ajoutent-t-ils : d’après eux, les autorités sanitaires « devraient prendre pleinement conscience des risques liés au non-recours aux services de santé par les patients » et diffuser, en particulier si une seconde vague se dessinait, des « messages de santé publique [plus] appropriés ».
Une réelle diminution de l’incidence des infarctus du myocarde ?
Les chercheurs n’excluent toutefois pas la possibilité que le confinement ait engendré une réelle réduction de l’incidence des infarctus du myocarde.
Alors qu'une précédente enquête parisienne concernant les arrêts cardiaques « a montré que la multiplication du nombre d'infarctus extrahospitaliers s'est limitée aux 2 premières semaines du confinement, la diminution des admissions pour infarctus aigu dans le registre Frenchie est restée constante sur 4 semaines », expliquent les chercheurs. Le renoncement aux soins pourrait ainsi, ne constituer la cause principale de la diminution des hospitalisations qu'au tout début du confinement.
Passées ces deux premières semaines de confinement, dans un contexte marqué par une réduction des activités humaines et de la pollution atmosphérique, la population aurait simplement pu moins souffrir d’infarctus du myocarde qu’auparavant. « La pollution atmosphérique est un déclencheur connu de l'infarctus aigu du myocarde, et […] une réduction de 30 % du dioxyde d'azote a été observée [rapidement] après le début du confinement », avancent les auteurs. De même, une diminution de l’activité physique, voire du stress professionnel, pourrait également avoir contribué à une « véritable » chute transitoire du nombre d'infarctus du myocarde aigus.
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