Les épidémies hivernales ou encore la diffusion rapide du Covid-19 ont montré la nécessité de disposer de données fiables pour décrire l’évolution des maladies au sein de la population. Le réseau Sentinelles répond à ce besoin depuis 1984 et constitue un outil complémentaire aux autres réseaux de surveillance (données hospitalières, SOS médecins, registre des décès…). Ce système de veille gère au quotidien une base de données concernant 10 indicateurs de santé en soins primaires. Parmi eux on retrouve des maladies transmissibles fréquentes comme les infections respiratoires, les diarrhées aiguës, la varicelle, ou plus rares les oreillons… Cela concerne également des pathologies comme la maladie de Lyme ou des comportements associés à la santé mentale comme les actes suicidaires. Ces informations sont remontées au quotidien par tout un réseau de médecins volontaires et bénévoles, dits médecins Sentinelles, au gré de leurs consultations et des cas qu’ils rencontrent.
Une matière première pour réaliser des estimations
Ces remontées au plus près du terrain par les médecins Sentinelles constituent la matière première pour les équipes du réseau. « Les données qu’ils fournissent sont précieuses et ce sont elles qui nous permettent de réaliser nos estimations et nos études », indique Marie Pouquet, épidémiologiste travaillant pour le réseau. Le recueil des données, non nominatives, se fait grâce à une plateforme de télésurveillance accessible à tous les médecins Sentinelles. Chaque semaine, ils font remonter les informations relatives aux cas qu’ils ont diagnostiqués lors de leurs consultations. Une fois leur qualité vérifiée, les données collectées sont soumises aux analyses statistiques pour déterminer le taux d’incidence de chaque maladie surveillée et assurer une surveillance en temps quasi-réel des épidémies en cours. En plus de leur participation à la veille sanitaire, les médecins Sentinelles ont accès à un bulletin hebdomadaire, des webinaires et des dossiers mensuels offrant un aperçu de l’actualité épidémiologique du moment et un complément d’information scientifique. L’organisation en réseaux constitue une autre plus-value pour ses membres puisque la plateforme leur permet de communiquer entre eux. « Pendant la pandémie de Covid-19, le forum a très bien fonctionné puisque les médecins du réseau ont pu échanger de nombreuses informations sur les recommandations ou encore des cas particuliers qu’ils rencontraient », confirme Marie Pouquet.
Les données fournies sont précieuses, elles nous permettent de réaliser nos estimations et nos études
Marie Pouquet, épidémiologiste
Des disparités de surveillance entre les régions
Au-delà de la surveillance des épidémies saisonnières, le réseau Sentinelles contrôle des indicateurs faisant l’objet d’une surveillance plus diffuse. Les informations remontées par les médecins permettent également d’apporter des connaissances sur les caractéristiques cliniques et épidémiologiques des patients. Par ailleurs, les médecins Sentinelles ont aussi la possibilité, s’ils le souhaitent, de participer à des études ponctuellement menées par l’équipe ou sur sollicitations d’institutions publiques comme la direction générale de la santé (DGS), Santé publique France, ou d’autres équipes de recherche.
Afin de continuer à garantir la fiabilité des données et du travail du réseau, les membres cherchent à accentuer le recrutement des médecins Sentinelles sur le terrain. « La pandémie de Covid-19 a mis en évidence des disparités assez fortes dans la couverture des différentes régions, explique Marie Pouquet. L’objectif est de permettre à ce réseau de surveillance de fournir des estimations régionales précises et ainsi de pouvoir mieux suivre les épidémies à l'échelle régionale ».
Une équipe constituée de profils variés
L’équipe du réseau Sentinelles inclut des médecins, biostatisticiens, épidémiologistes, informaticiens, techniciens de recherche et une chargée de communication. Elle compte 29 personnes qui travaillent au sein de sa coordination nationale et dans six antennes régionales qui gèrent au niveau local le réseau des médecins et la remontée des informations.
Au 1er janvier 2023, le réseau compte 1 234 médecins généralistes libéraux (soit 2,2 % des médecins généralistes libéraux) et 128 pédiatres libéraux (4,8 % des pédiatres libéraux) répartis sur le territoire métropolitain français.
Le réseau Sentinelles est coordonné par l’équipe « Surveillance et modélisation des maladies transmissibles » de l’institut Pierre Louis d’épidémiologie et de santé publique, une unité de recherche placée sous la tutelle de l’Inserm et de Sorbonne Université.
Des travaux à l’échelle internationale
En plus d’être une source d’information pour de nombreux médias et les médecins sur le terrain, les travaux du réseau sont à l’origine d’articles publiés dans des revues internationales à comité de lecture, ou de rapports. L’indicateur de surveillance des actes suicidaires a par exemple été utilisé dans le cadre de l’étude sur l’impact de la pandémie de Covid-19 sur les actes suicidaires dans la patientèle des médecins généralistes. Un autre a apporté des données sur les cas de coqueluche chez les adolescents et les adultes jusque-là plutôt rares en France.
Au niveau européen, l’équipe du réseau Sentinelles participe en même temps que d’autres réseaux, hôpitaux et laboratoires de dix pays au projet VEBIS (ex projet I-MOVE). Il s’agit, grâce aux données remontées par les médecins Sentinelles sur les patients atteints d’infections respiratoires aiguës, de renforcer le système européen de surveillance et d’estimer l’efficacité des vaccins comme ceux de la grippe ou de la Covid-19.
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