Débuter un traitement antirétroviral dès quatre semaines après une infection au VIH pourrait permettre de contrôler le virus sur le long terme, même après l’arrêt du traitement. C’est le résultat mis en évidence par une étude publiée le 11 janvier 2024 dans la revue Nature Communications.
Les scientifiques de l’Institut Pasteur, du CEA, de l’Inserm, d’université Paris Cité et de l’université Paris-Saclay, en collaboration avec l’institut Cochin ont utilisé un modèle primate d’infection par le virus d’immunodéficience simienne (SIV), dont les paramètres principaux sont comparables à ceux du VIH chez l’homme. Pour mener cette étude, ils ont essayé de reproduire chez l’animal les conditions de la cohorte Visconti au sein de laquelle les trente sujets dits « contrôleurs post-traitement » ont montré un état de rémission possible et durable, jusqu’à 20 ans après l’arrêt de leur traitement. « Or, la plupart d’entre eux avaient été traités dans les 30 jours après l’infection, décrit Asier Sáez-Cirión, responsable de l’unité Réservoirs viraux et contrôle immunitaire à l’Institut Pasteur et co-auteur principal de l’étude. D’autre part, dans les cohortes humaines, nous avions observé une réduction du réservoir viral bien plus importante durant les 24 premiers mois du traitement. C’est ce qui a déterminé nos paramètres d’étude. »
Un résultat en décalage avec la réalité
Les singes ayant reçu un traitement peu de temps après l’infection et durant deux ans bénéficiaient d’un effet protecteur, contrairement à ceux qui avaient été traités pour la première fois plusieurs mois après l’infection, lors de la phase dite chronique, ou ceux qui n’avaient pas été traités. « Au bout de 24 mois, à l’arrêt du traitement, les macaques ayant été traités précocement ont réussi à contrôler le virus qui est devenu indétectable. Mais, nous n’aurons probablement pas de résultats aussi tranchés chez les humains », nuance Asier Sáez-Cirión. Il déconseille ainsi aux patients correspondant aux critères de l’étude d’arrêter leur traitement brutalement en dehors de tout essai clinique, tant qu’un protocole de suivi n’a pas été mis en place. Un essai clinique, nommé Rhiviera 01, a débuté afin de suivre l’évolution de la charge virale chez des patients ayant reçu un traitement précoce pendant plus de deux ans. « Nous ne connaissons pas encore les facteurs qui permettent de prédire quels patients contrôleront la maladie après l’arrêt du traitement », ajoute-t-il.
D’autres études seront nécessaires pour comprendre les mécanismes en jeu. Néanmoins, les chercheurs ont observé que la mise en place d’un traitement précoce et prolongé favorise le développement des lymphocytes T CD8 mémoire. Ces cellules « ont une capacité antivirale plus importante et sont ainsi capables de contrôler efficacement le rebond viral qui apparaît après interruption du traitement », explique le communiqué issu de l’étude. Or, lorsque le traitement est pris plus tardivement, « on perd cette optimisation de la réponse immunitaire », développe Asier Sáez-Cirión.
Ces résultats ne sont ainsi pas applicables lorsque le début du traitement se fait cinq ou six mois après l’infection, « ce qui est déjà très court par rapport à la réalité clinique. Les dépistages se font tardivement, même parfois en phase sida. Seulement moins d’un tiers des personnes dépistées sont en primo-infection, dans les deux à six semaines après l’infection », souligne Asier Sáez-Cirión, précisant pourtant que les tests permettent aujourd’hui de dépister le VIH précocement.
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