Devant une couverture vaccinale en berne, le 12 janvier dernier, Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, présentait un plan d’action pour la rénovation de la politique vaccinale. Ce jour-là, était lancé le projet une grande conférence citoyenne sur la vaccination, via internet notamment, dont la coordination a été confiée à Alain Fischer, professeur d’immunologie pédiatrique. Comme prévu, quasiment jour pour jour, cette commission vient de rendre sa copie.
Le maintien ou la levée de l'obligation vaccinale était l'un des grands enjeux de cette concertation citoyenne menée par l'immunologiste de l'Institut Imagine et par Claude Rambaud (CISS). Le débat était d’autant plus nécessaire que le rapport parlementaire sur la vaccination en France, de Sandrine Hurel, remis préalablement à la ministre ne s’était pas prononcé à ce sujet.
Vive ... l'obligation !
Le Comité d'orientation de la concertation citoyenne tranche la question en recommandant, comme on pouvait s'y attendre, de ne plus faire de distinction entre vaccinations obligatoires et recommandées. « Il n'est plus possible de faire coexister ces deux notions, car dans l'esprit du public cela signifie que seuls les vaccins obligatoires sont indispensables, explique le Dr Jean-Louis Bensoussan, médecin généraliste et représentant du Collège de la médecine générale au sein du Comité d'orientation. L'ensemble des onze vaccinations de l'enfant doivent être sur un même pied d'égalité ».
Au terme de l’examen de plusieurs scenarii, c’est celui de l’élargissement temporaire de l’obligation vaccinale avec clause d’exemption qui a été retenu « tout en attendant que les conditions soient réunies pour une levée de l’obligation » précise le rapport. En effet, le scenario qui envisageait la levée des obligations n’a pas remporté le vote du jury et des experts, même si d’autres pays européens assurent un bon niveau de couverture vaccinale dans ce contexte. Selon le rapport, « les données des enquêtes d’opinions (…) laissent craindre qu’un tel scénario conduise à une baisse rapide de la couverture vaccinale (…) et la résurgence de maladies infectieuses évitables ».
« Cela pourrait permettre d'augmenter la couverture vaccinale contre un certain nombre de maladies pour lesquelles la France accuse un retard très important, remarque le Dr Bensoussan. La situation actuelle montre que les recommandations fortes ne suffisent pas ». L'exigibilité reviendrait, de fait, à faire passer de trois à onze le nombre de vaccins obligatoires, si le comité n'avait prévu, de manière surprenante, une « clause d'exemption », pour les familles qui seraient opposées à l'une ou l'autre des vaccinations.
Le Comité semble avoir voulu concilier ainsi les avis d'un certain nombre de membres du jury citoyen, pour qui les familles doivent avoir le libre choix de la vaccination, et les priorités de santé publique, en tablant sur le fait que le nombre d'exemptions serait très faible.
Inclure plus d'objectifs vaccinaux dans la ROSP
Plusieurs mesures recommandées concernent plus spécifiquement les médecins généralistes. Aujourd'hui seule la vaccination antigrippale fait partie des critères pour la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP). Le Comité demande que des vaccins de l'enfant, en particulier le ROR, soient également inclus parmi ces objectifs, dès le prochain avenant de la Convention.
Et, alors que le fait pour les patients de devoir acheter les vaccins à la pharmacie complique l'acte vaccinal. Les députés se sont prononcés pour que les médecins puissent disposer de stocks de vaccins anti-grippaux à leur cabinet. « Nous proposons que cela soit étendu aux autres vaccins », observe le Dr Bensoussan. Le Comité demande également que les vaccins exigibles soient remboursés à 100 % par l'Assurance maladie, ce qui représente un signal fort en faveur de la vaccination. Par ailleurs, il se déclare en faveur de l'autorisation pour les pharmaciens de réaliser la vaccination antigrippale des adultes, mesure que les députés sont en train de voter. Il souligne enfin le besoin d'un dossier médical partagé contenant les informations sur les vaccinations.
Anticipation et information
Et puis, les pénuries de vaccins compliquent la tâche des généralistes. Elles sont liées à des problèmes de fabrication, mais aussi à la manière dont les états gèrent leurs commandes. « Nous demandons qu’il y ait une meilleure anticipation des besoins pour ne pas être exposé à des ruptures de stock », précise le Dr Bensoussan. En revanche il n'y a pas de recommandation pour rétablir la production de vaccins monovalents, « parce que l'on est dans l'exigibilité des onze vaccins ».
L'information tient, bien sûr, une grande place dans les recommandations du Comité qui, dès le début du rapport, demande fermement aux autorités de tutelle de communiquer sur les bienfaits de la vaccination, avec des arguments scientifiques. « Il faut arrêter de laisser libre court aux détracteurs de la vaccination qui ont aujourd'hui un discours dominant dans les médias. Les pouvoirs publics sont restés très absents dans ce domaine, depuis longtemps », regrette le Dr Bensoussan.
Quel jugement porte-t-il sur cette concertation ? « C'est une belle expérience de démocratie participative. Les prises de position ont été respectées, jusqu'à accepter que dans le rapport il y ait des positions divergentes, comme la mienne ». Le rapport est maintenant sur le bureau de la Ministre, qui devra décider quelles suites lui donner.
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