La moitié des patients consultent les avis Google des médecins… mais ce critère de choix reste très secondaire

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Publié le 05/04/2022
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Crédit photo : PHANIE

« Une vraie machine à cash », « médecin scandaleux », « la pire des raclures » : depuis plusieurs années, les libéraux n’échappent pas aux avis et notations sur internet, des commentaires parfois peu reluisants, qui peuvent aller dans certains cas jusqu'aux injures et aux propos haineux. Au 1er mars 2022, pas moins de 1,3 million d’avis Google sur plus de 205 000 professionnels de santé ont été recensés.

Selon un sondage* OpinionWay pour DoctiZen, mené en octobre 2021 auprès de 957 Français, 57 % des patients sondés déclarent consulter (au moins ponctuellement) les avis publiés sur internet au sujet des professionnels de santé. Plus les patients sont jeunes, plus ils sont enclins à faire le tour du web avant une consultation. Ainsi, 77 % des 25-34 ans consultent les avis en ligne, tout comme 73 % des parents d’enfants mineurs. À l’inverse, l’immense majorité des plus de 50 ans (85 %) ne consultent que « rarement » ou « jamais » les avis et commentaires en ligne. S'il se démocratise, ce réflexe est toutefois loin d’être systématique (seuls 5 % des sondés sont dans ce cas, 18 % le font souvent).

Spécialistes et dentistes davantage pistés

À une écrasante majorité, les patients consultent préférentiellement les avis de médecins ou paramédicaux qu’ils ne connaissent pas. Seuls 11 % d’entre eux jettent un œil à la notation des praticiens qu’ils ont déjà consulté, selon l'édition 2020 du sondage OpinionWay pour Doctizen. Deux tiers des patients surfent avant la prise de rendez-vous, 19 % après la consultation…

« Les médecins spécialistes, les dentistes et les ostéopathes sont ceux pour lesquels les avis sont le plus consultés », précise l’étude. Parmi les patients qui regardent les avis, 61 % naviguent sur la fiche d’un médecin spécialiste, 47 % d’un dentiste et 41 % sur celle d’un généraliste. 

 

avis google

 

Rassurer, vérifier 

Qu’est ce qui pousse les patients à consulter les avis Google d’un praticien ? « Pour au moins un tiers des personnes, les avis permettent de se rassurer sur les professionnels de santé et leurs compétences, mais également de pouvoir les comparer », répondait encore le sondage de 2020. 38 % des patients disent ainsi vouloir « vérifier les compétences » du médecin.

 

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Toutefois, les internautes sont loin de donner un blanc-seing aux notations en ligne. Ainsi, 35 % d’entre eux concèdent ne pas les trouver « fiables » et 42 % pas indispensables. C'est plutôt un élément parmi d'autres, et qui reste secondaire. Alors que la moitié des patients considèrent que les avis font partie des critères de choix d’un nouveau médecin, ils ne sont cités qu’en 8e position des facteurs orientant leur décision, bien loin derrière la localisation du cabinet, mentionné par 80 % des répondants, les conseils d’un autre confrère ou la disponibilité des rendez-vous. 

Les jeunes commentent plus

Si plus d'un Français sur deux consulte volontiers les avis, ils sont nettement moins nombreux à commenter directement. Seuls 14 % des répondants affirmaient en octobre dernier avoir déjà publié un avis sur un médecin. Une proportion qui grimpe toutefois à 34 % pour les 18-34 ans.

Lorsqu’ils prennent la plume, les patients le font plus souvent dans une démarche bienveillante. 46 % affirment commenter car ils sont « satisfaits du professionnel et souhaitent le faire savoir », 34 % le font pour « améliorer sa notoriété ». Néanmoins, trois sur dix rédigent un avis car ils sont insatisfaits, 16 % pour « pousser » le praticien à s’améliorer.

Réponse empathique

Mais cette apparente bienveillance revendiquée dans les avis est à contrecourant du sentiment des praticiens eux-mêmes, analysé en 2020 dans une thèse de médecine générale, soutenue par la Dr Axelle Durocher. Les quinze généralistes interrogés percevaient les commentaires défavorables « comme malveillants, rédigés dans l'intention de leur nuire plutôt que d’améliorer les soins ». Ils les considèrent « comme des réactions brutales et impulsives de patients frustrés ou insatisfaits ».

Derrière les notations en ligne se joue la e-réputation du praticien. « Les professionnels de santé n'ont ni le temps ni la vocation de gérer leur réputation sur internet. Pour autant, en cas de délit de diffamation ou injure, le praticien doit agir dans les trois mois suivant la publication du contenu, sous peine de voir le délit prescrit… Et sa réputation définitivement injustement entachée », conseille Sébastien Menendez, co-fondateur de DoctiZen.

En 2018, le Conseil national de l’Ordre des médecins a publié de son côté un guide pratique pour gérer sa e-réputation. Parmi les stratégies, le Cnom conseille « face à des avis ou propos portant atteinte à votre image d’y apporter une réponse empathique ayant pour objectif d’améliorer votre image, sans faire de publicité, naturellement », et sans entacher le secret médical.

* Étude réalisée auprès de 957 Français ayant consulté pour eux-mêmes ou leurs enfants des médecins ou paramédicaux libéraux au cours des 12 derniers mois, issus d’un échantillon de 1129 Français âgés de 18 ans et plus, représentatifs de la population française au regard des critères de sexe, d'âge, de catégorie socio-professionnelle et de région de résidence (quotas)


Source : lequotidiendumedecin.fr