Strasbourg s'apprête à accueillir la 8e édition du Forum européen de bioéthique, du 30 janvier au 4 février, entièrement consacrée aux thématiques de la reproduction, sous le titre parlant de « produire ou se reproduire ? ».
Président et fondateur du Forum, le Pr Israël Nisand en a présenté, en amont, les grandes lignes, avec une nouvelle formule qui laissera plus de place aux intervenants et aux présentations spécialisées, tout en poursuivant bien sûr le débat avec le grand public qui a fait sa force. « Les Strasbourgeois ont la chance de pouvoir dialoguer, une semaine par an, avec les meilleurs spécialistes français de la bioéthique, et de nombreuses villes nous envient », relève-t-il.
De plus, le Forum se déroule cette année au moment des États généraux de la bioéthique, prélude à la refonte des législations actuelles. Parmi les intervenants, on note d'ailleurs la présence du Pr Jean-François Delfraissy, président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE). La révision de la loi de bioéthique fera aussi l'objet d'un débat (dimanche 4 février).
Une évolution spectaculaire des mentalités
À l'occasion de l'événement, une enquête IFOP commandée par le Forum européen de bioéthique et le journal « La Croix » montrait que le recours à la gestation pour autrui (GPA), sévèrement puni en France, est pourtant jugé admissible par 64 % des Français. De même, ils sont presque aussi nombreux à admettre le principe de la PMA pour les couples de femmes homosexuelles, et un peu moins pour les femmes célibataires.
Cette enquête révèle aussi que près de neuf Français sur dix sont désormais favorables au suicide assisté et/ou l’euthanasie. En outre, huit Français sur dix se prononcent en faveur des modifications génétiques des embryons dans un but thérapeutique, mais rejettent les modifications destinées à « améliorer » certaines caractéristiques des enfants à naître.
Ces résultats posent le problème de l’adéquation entre la législation et l’opinion. L’enquête montre une évolution spectaculaire des mentalités en France au cours des dernières années, alors même que l’arsenal législatif français reste extrêmement strict. Le Pr Nisand n’a de cesse de rappeler qu’il voit régulièrement des couples partir à la recherche d’une mère porteuse à l’étranger – « pour 100 000 euros en Californie, 50 000 au Royaume-Uni, 3 000 en Ukraine et 1 000 en Inde », et s’interroge ouvertement sur la pertinence des lois françaises à ce sujet. Un compromis au cas par cas pourrait, selon lui, limiter les dérapages liés à l’interdiction généralisée qui favorise « des pratiques innommables dans certains pays étrangers ».
Dépasser les fantasmes et les illusions
« Nous devons avoir le courage de débattre ouvertement de la GPA », poursuit le Pr Nisand, même si le simple fait de donner la parole à tous les protagonistes, y compris aux traditionalistes les plus farouches, lui a déjà valu des bordées d’injures sur les réseaux sociaux… émanant aussi bien des partisans que des détracteurs de ces techniques. « Dans tous les cas, conclut-il, le débat bioéthique sur la reproduction, comme d’ailleurs celui sur la fin de vie, font voler en éclats les "vieux arguments d’autorité", qui décrètent au nom du peuple ce qui est bien et ce qui est mal dans ce domaine. Et c’est aussi par l’approfondissement du débat que l’on parviendra à dépasser les fantasmes et les illusions qui entourent le progrès scientifique et médical. »
Le programme détaillé du forum, ainsi que la liste des intervenants, est disponible sur le site, www.forumeuropeendebioethique.eu
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