Membre du groupe qualité CHMP*, Jean-Paul Fournier qui a siégé à la Commission de la pharmacopée européenne pendant 17 ans et appartenu au Groupe « Qualité » de l’Ema (European Medicine Agency), juge l’affaire inédite.
L’expert n’a que peu d’hypothèses : un acte de malveillance toujours possible dans un circuit qui comporte des interventions humaines, une erreur grossière, ou une anomalie lors du processus de « vide de chaîne », l’étape qui consiste à nettoyer, débarrasser, aspirer une chaîne de conditionnement d’un principe actif A avant de passer au conditionnement du principe actif B.
Quelques comprimés de zopiclone auraient ainsi pu séjourner accidentellement dans les conduits d’alimentation d’une chaîne de conditionnement avant de rejoindre ceux du furosémide. Mais « c’est incompréhensible, les processus de nettoyage sont extrêmement poussés et a priori infaillibles » reconnaît Jean-Paul Fournier.
Sur place, TEVA a procédé à l’audition de tous les opérateurs de cette étape. « Une erreur humaine est toujours possible, mais elle serait grossière ». En amont ? « C’est impossible, assure M. Fournier. Les principes actifs des deux produits arrivent dans des containers scellés qui sont ouverts séparément ».
« Je connais bien ce site, enchaîne M. Fournier, TEVA l’a racheté à Bayer. L’usine possède une longue culture pharmaceutique, une tradition industrielle avec des procédures qui correspondent tout à fait aux standards internationaux et un contrôle qualité très récent. Ce n’est pas un site de conditionnement monté à la va-vite ».
De mémoire, l’expert site une seule affaire similaire portée à sa connaissance : des blisters renfermant un seul principe actif mais sous 2 dosages 100 mg et 600 mg.
Le système aurait-il des failles ? « Les chaînes de production de génériques connaissent des alternances plus fréquentes que les principes actifs qui produisent en continu », remarque M. Fournier. Pour l’expert, le risque se situait surtout en aval, côté patients : « J’ai demandé à plusieurs reprises que les génériques soient différenciables par leur couleur, y compris pour les dosages, et notamment pour les psychotropes où il y a beaucoup d’adaptations posologiques. Pour deux posologies voisines – 1 mg et 2 mg, les tailles des comprimés ne diffèrent que 1,5 mm. Je doute que les patients puissent s’y retrouver ». Une demande restée sans écho.
* Committee for Medicinal Products for Human use.
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