Depuis plusieurs jours, les autorités sanitaires ont les yeux tournés vers la Mayenne, dont le nombre de cas Covid a dépassé le seuil d'alerte (50,1 nouveaux cas pour 100 000 habitants détectés en sept jours). Le taux de reproduction (R) y est aux alentours de 1,50 contre 1,20 au niveau national et, depuis jeudi 16 juillet, le port du masque est obligatoire dans les lieux clos recevant du public de six communes. Président des Généralistes-CSMF et médecin coordinateur de l'Association départementale pour l'organisation de la permanence des soins (ADOPS) dans ce département, le Dr Luc Duquesnel regrette le refus de l'ARS Pays de la Loire de valider le plan d'organisation proposé par son association, fondé sur huit centres Covid. Il dénonce aussi le manque d'anticipation de la tutelle sanitaire.
LE QUOTIDIEN : Votre département compte plusieurs foyers de Covid-19. Dans les cabinets, les médecins généralistes ont-ils identifié cette situation à risque ?
Dr LUC DUQUESNEL : Oui. Au moment du déconfinement, le département affichait 145 cas Covid +. Entre le 3 et le 6 juillet, nous sommes passés à 219 cas, soit 50 % en plus. Et le 9 juillet, 255 cas étaient recensés. Aujourd'hui, la Mayenne dépasse les 300 cas. Depuis plus de trois semaines, nous voyions de plus en plus de patients atteints de Covid, y compris de cas avec des formes sévères et des jeunes patients. Nous avons tout de suite alerté l'ARS dès que nous avons vu que le virus circulait dans notre département. Le 15 juin, nous lui avons présenté un plan d'organisation ambulatoire à mettre en place dès le 11 juillet après la fin de l'état d'urgence sanitaire. Mais le 25 juin, nous avons reçu une fin de non-recevoir provoquant la fermeture de huit centres Covid dédiés pour accueillir tous les patients suspects.
Que prévoyait ce plan ?
Outre le maintien des huit centres Covid avec médecins et infirmiers, le plan qui couvrait tout le département proposait d'orienter les patients suspects vers un médecin de garde Covid, d'informer les médecins traitants des patients suspects et de suivre ceux qui n'ont pas de médecins traitants par un médecin généraliste. Pour faire tout cela, nous avions prévu de nous appuyer sur la plateforme territoriale d'appui Palex et sur un pool de 23 médecins généralistes avec des astreintes jusqu'à fin août dans les centres Covid.
Comment expliquez-vous le refus de l'ARS ?
Dans une réponse datant du 25 juin, l'ARS estime que le virus circule peu en Mayenne et qu'une telle organisation paraît trop mobilisatrice de ressources humaines pour seulement une vingtaine de patients par jour au maximum. Par ailleurs, elle considère que les médecins généralistes sont en capacité d'assurer les consultations de leurs propres patients en présentiel avec les équipements de protection ou en téléconsultation, même si cela complique l'organisation. Or, l'ARS s'est plantée dans son appréciation. Beaucoup de médecins consultent sans rendez-vous, d'autres n'ont pas deux salles d'attente pour séparer les patients suspects Covid des autres.
En plus, dans un département déficitaire démographiquement où la situation est généralement tendue en été, on ne doit pas prendre le risque de ne pas répondre positivement à une telle proposition d'organisation. Aujourd'hui, le centre 15, les urgences, la pédiatrie sont débordés. L'Assurance-maladie n'arrive pas renseigner tous les cas contacts Covid. Pour le week-end prolongé du 14 juillet, il y a eu 400 appels par jour alors qu'habituellement, on tourne à 150 appels. Face au Covid, l'ARS a fait une grosse bourde en rejetant notre plan d'organisation ambulatoire.
Est-ce que l'ARS est revenue sur sa décision ?
Elle m'a en effet contacté le 6 juillet mais c'était trop tard. Depuis sa réponse du 25 juin, j'ai annulé toutes les réunions de préparation avec la plateforme territoriale d'appui et les secrétaires de l'association de permanence des soins pour mettre en place le plan d'organisation. Nous ne sommes plus en mesure de mettre en place le plan proposé le 15 juin car nous ne pouvons pas mobiliser médecins, infirmiers et personnels administratifs sur un claquement de doigts.
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