LE QUOTIDIEN - Que proposez-vous face à la dette de Sécurité sociale ?
PHILIPPE POUTOU - Il faut commencer par supprimer les 31 milliards d’euros exonérations de cotisations sociales des entreprises, qui s’ajoutent aux cadeaux fiscaux. Nous mènerons une politique d’embauche et d’augmentation des revenus pour tous. 100 000 emplois en plus, ce sont 3 milliards pour les comptes de la Sécu. Et une hausse de 1 % des salaires, c’est un à deux milliards de plus.
Il faut aussi agir sur les fraudes importantes, celles des entreprises. On nous impose une logique de restriction alors qu’il faut faire un autre choix politique qui consiste à organiser une autre répartition des richesses. Il faut enfin abroger la dette des hôpitaux qui souffrent d’un manque de recettes, et non de trop de dépenses, et leur permettre de financer leurs gros investissements à taux zéro auprès d’un organisme public comme la caisse des dépôts.
Vous proposez la prise en charge à 100 % des soins pour tous. Comment financez-vous cette nouvelle charge pour l’assurance-maladie ?
Si au lieu de baisser le coût du travail, ce qui ne sauve pas les emplois, on augmentait la part patronale des cotisations sociales, il serait possible de financer un système de santé gratuit pour tous. Sur les 20 dernières années, 10 % du PIB, c’est-à-dire 200 milliards d’euros par an, sont passés de la poche des salariés aux coffres-forts des capitalistes et des actionnaires. Avec ces 200 milliards de plus par an, nous avons des marges de manœuvre pour la santé, les retraites. Et comme nous menons parallèlement une politique d’embauche, ces nouveaux salariés vont cotiser et alimenter les caisses de la Sécu et de l’État.
Votre programme prône la suppression du paiement à l’acte et l’interdiction de tous les dépassements. Ne risquez-vous pas de braquer les médecins libéraux ?
Il y a toujours un risque. Dès qu’on discute d’une mesure sociale qui irait dans le sens d’une amélioration pour des millions de gens, on nous dit que ce n’est pas possible ! Des médecins s’opposeraient à cette mesure, mais d’autres la comprendraient. L’idée n’est pas de s’en prendre aux revenus des uns ou des autres, mais de discuter d’un service public de santé qui permette à l’ensemble de la population de se soigner, ce qui n’est pas le cas actuellement. On voit bien que la médecine libérale et le paiement à l’acte ne rencontrent pas un grand succès auprès des jeunes médecins. Nous prônons donc son remplacement par un paiement à la fonction. Nous n’avons pas de réponse toute faite sur les modalités, mais il faut changer de logique et en premier lieu supprimer les dépassements d’honoraires. J’ajoute qu’au-delà du droit aux soins, il faut passer au droit à la santé en agissant sur certaines causes de maladies, comme la nutrition, ou les conditions de vie et de travail.
Vous préconisez la mise en place de centres de santé publics et gratuits, installés partout où il y a une demande de soins. Comment faire pour que les médecins exercent là où vous installerez ces centres ?
La liberté d’installation ne garantit pas l’accès aux soins et on sait que lors des négociations des prochaines conventions médicales, la tentation sera forte de mettre en place des mesures plus ou moins autoritaires en matière d’installation. D’où nos propositions de centres de santé gratuits et pluridisciplinaires et de la fin du numerus clausus. Autre piste : un statut du médecin en formation, à négocier, permettrait la rémunération des jeunes médecins pendant leur cursus, au SMIC revalorisé à 1 600 euros, avec en contrepartie l’engagement à servir pendant quelques d’années là où on a besoin d’eux. Ce statut permettrait la démocratisation des études médicales. J’ajoute que la contrainte existe pour tout le monde, on ne travaille pas toujours là où on voudrait.
Vous suggérez de rembourser les médicaments à 100 % s’ils sont efficaces...ou de ne pas les fabriquer s’ils n’apportent rien de nouveau. Comment allez-vous procéder ?
Il y aura forcément une période de transition. C’est un objectif fort car nous ne voulons pas que le profit détermine tout. Il est révoltant que la notion de profit domine dans la santé. Il faudrait exproprier à l’échelle européenne les laboratoires pharmaceutiques et nationaliser la recherche. Nous ne voulons pas tout étatiser mais les secteurs stratégiques comme la santé, l’énergie ou la banque ne peuvent pas rester entre les mains des financiers, ils doivent être contrôlés par les salariés.
Vous voulez abroger la loi HPST. Que lui reprochez-vous ?
Cette loi est comme le plan hôpital 2007, c’est le renforcement de la logique de rentabilité. On ne pense qu’à économiser et la santé passe après. Cette logique destructrice se traduit par la baisse du personnel, les regroupements d’hôpitaux et la focalisation sur les actes les plus rentables. Cette loi va encore plus loin dans cette logique, il faut la supprimer.
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