Mobilisation et agilité ! « Nous n'avons pas à rougir de notre écosystème de l'innovation en santé », assure Franck Mouthon, président de France Biotech, qui abrite plus de 2 000 entreprises innovantes en santé – une filière Healthtech hexagonale très dynamique qui représente 50 000 emplois directs et indirects en 2020 (130 000 postes supplémentaires d'ici à 2030).
« 2021 va être une année extrêmement riche », ajoute le PDG fondateur de l'une des pépites françaises, Theranexus. De fait, depuis le début de la crise, nombre d'entreprises de la healthtech française ont réorienté leurs plateformes et leurs technologies pour développer des candidats vaccins, des stratégies thérapeutiques ou des outils de diagnostic contre le SARS-CoV-2 (environ un quart d'entre elles ont engagé au moins un programme de recherche en ce sens). Selon France Biotech, plus d'une centaine de solutions ont déjà été développées dans le cadre de la pandémie.
Plutôt de petite taille et de création récente, ces biotechs ont fait preuve de faculté d'adaptation et de résilience. C'est le cas d'Osivax, qui développe un portefeuille de vaccins universels contre des virus respiratoires saisonniers et pandémiques comme la grippe. Alors que le nouveau coronavirus ne faisait pas partie de ses recherches début 2020, la société fait le pari d'utiliser le même procédé pour un vaccin universel contre le Covid. C'est également le cas d'Aiova, positionnée contre les maladies virales émergentes et qui conçoit des vaccins de dernière génération, d'Ose Immunotherapeutics, spécialisée en immunothérapie (stratégie multi-cibles ou variants) ou encore de Flash Therapeutics, société de thérapie génique qui développe des technologies de transfert d’ADN et d’ARN.
Un Barda européen ?
Tous ces entrepreneurs se sont mobilisés rapidement dans la quête d'un candidat vaccin grâce notamment au soutien de la banque publique d'investissement (Bpifrance), via notamment l’appel à projets PSPC-Covid (84 millions d'euros), complété par le plan de relance et l'appel à manifestation d'intérêt (AMI). Pour Alexandre Levert (Osivax), « Bpifrance a été réactive », constat partagé chez Ose Immunotherapeutics. « La BPI a répondu présente, concède son DG, Alexis Peyroles. Mais l'effort d'investissement peut être amplifié du côté des autorités qui étaient focalisées sur l'achat de doses via l'Europe ».
Car nos voisins frappent plus fort. L'exemple de la pépite CureVac qui a bénéficié de 300 millions d'euros du gouvernement allemand est éloquent. Tout comme les 483 millions de dollars obtenus par Moderna dès avril 2020 de la part du puissant « BARDA » américain (autorité pour la recherche et le développement biomédical avancé), alors que le vaccin était en phase I des essais cliniques. Pour Franck Grimaud, DG de la biotech nantaise Valneva, qui livrera ses premiers vaccins au Royaume-Uni avant la fin 2021, l'Europe a tout intérêt à créer une structure de soutien équivalente. L'UE y travaille avec la future Autorité européenne de préparation et de réaction en cas d’urgence sanitaire (HERA).
« Pas un petit rhume »
« Ce qui nous a manqué, au début de la pandémie, c'est la capacité d'avoir des technologies très proches de la clinique, résume Pascale Bouillé, CEO de Flash Therapeutics. Il faut anticiper et engager des investissements, privés et publics, beaucoup plus forts dans la recherche afin de multiplier les initiatives. La collaboration, en amont des pandémies, avec les industriels et les laboratoires académiques, est un point clé de réussite pour mettre au point rapidement ce type de vaccin ».
C'est donc un écosystème plus favorable que les industriels français appellent de leurs vœux. Car la bataille du Covid sera sans doute de longue haleine. « Ce n'est pas un petit rhume qui va s'arrêter dans quelques années, prévient Corinne Ronfort, CEO d'Aiova. On est également en train d'infecter les animaux, et peut-être la faune sauvage ! ».
Vaincre la frilosité
La synergie scientifique et technologique est indispensable non seulement pour trouver de nouveaux vaccins mais aussi d'indispensables traitements. Et dans ce domaine, les biotechs françaises frappent au portillon. « La bonne stratégie pour obtenir vite des médicaments est de sélectionner des programmes et de les accompagner jusqu'à l'enregistrement », alerte là encore Alain Moussy, PDG d'AB Science.
Cette société, qui développe un candidat prometteur pour le traitement du Covid-19, avec le soutien de la Bpifrance et de la Banque européenne d'investissement (BEI), attend elle aussi de l'État un financement « massif » pour remédier à la frilosité des investisseurs privés. « En termes de visibilité économique, il est moins risqué pour un investisseur de s'intéresser à un vaccin dont on pense que le marché sera pérenne qu'à un traitement qui dépend malheureusement du nombre de patients qu'il faudra traiter », analyse Odile Duvaux, cofondatrice et PDG de la biotech nantaise Xenothera, spécialisée dans la production d'anticorps polyclonaux.
Fin janvier précisément, le gouvernement a assuré vouloir pousser les protocoles cliniques sur les traitements à base d'anticorps monoclonaux. Pour Odile Duvaux, l'intérêt de l'État pour ces anticorps est « une bonne nouvelle. Ça veut dire qu'on parle enfin d'eux comme une arme thérapeutique intéressante et je suis convaincue qu'il faudra des monoclonaux et des pluriclonaux. C'est la complémentarité des approches qui va payer ! On voit qu'il y a en France des capacités pour répondre à un marché et à un besoin qui va durer même si l'épidémie baisse en intensité. »
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