Contraction de « Hacker » et de « Marathon », le principe du « Health Hackathon » est né à Toronto, au Canada, afin de réunir médecins et informaticiens autour de recherches pratiques. « Les deux groupes viennent avec des idées et des besoins, font connaissance se mettent à travailler ensemble », explique Sébastien Letélié, développeur informatique à l’origine de cette rencontre.
Installés pendant trois jours et deux nuits au Forum de la Faculté de Médecine, les participants ont tenté de donner vie à 38 projets (1) portant sur la médecine quotidienne, mais aussi la pharmacie, la kinésithérapie et la médecine vétérinaire. Les meilleures apps, sélectionnées à l’issue de la rencontre, fleuriront peut-être bientôt sur les smartphones des patients, même s’il leur faudra aussi passer le cap délicat du développement commercial.
Le Steve Jobs de l’équipement médical
Si certains médecins et développeurs sont allés se coucher passé une certaine heure, d’autres, dans la plus pure tradition geek, ont passé toute la rencontre rivés sur leurs machines. Mais tous sont allés écouter Uwe Diegel, fondateur de la société iHealth et considéré comme le Steve Jobs de l’équipement médical. Il a été le premier, dès 2008, à créer des « apps » santé pour Smartphones. « Quand j’ai créé mon premier tensiomètre connecté, je me suis dit que c’était juste un gadget, mais j’ai vite compris que c’était un changement majeur, parce qu’on gérait enfin le patient lui-même et non plus la maladie », explique-t-il. Aujourd’hui, les apps santé se comptent par dizaines de milliers, annonçant l’avènement d’un patient connecté, déjà bien réel dans le monde anglo-saxon, mais encore balbutiant en France.
« Je suis effaré par notre retard dans ce domaine », déplore le Dr Frédéric Grabli, psychiatre libéral à Strasbourg, venu concrétiser ici deux idées d’apps qui lui tiennent à cœur. La première vise à établir des ordonnances réellement sécurisées, empêchant toute duplication illégale de la prescription : « Ça fait 17 ans qu’on en parle, ça mobilise une énergie énorme alors qu’il suffirait d’une app facile à développer, et flashable sur un QR code, pour régler définitivement la question », estime-t-il. En outre, il a imaginé un projet de reconnaissance photographique des médicaments : un patient, sa famille ou un professionnel pourra photographier un médicament isolé et l’envoyer à l’app, qui, connectée à une base Vidal, le reconnaîtra immédiatement et l’identifiera : très utile pour les patients qui ne savent pas s’ils ont pris tel ou tel produit, ou pour un professionnel en visite ou appelé en urgence, et qui trouve des médicaments sortis de leurs étuis chez un patient. De nombreuses autres apps ont été élaborées, totalement ou partiellement, pendant cette rencontre, toujours dans une optique pratique : parmi celles-ci, un logiciel de pré-consultation médicale, un réseau social pour les internes en médecine, un serious game sur la nutrition, ou des logiciels de surveillance de l’automédication ou des mouvements nocturnes, de même que des apps de télémédecine et de prévention.
Une démarche de santé globale
Une rencontre qui pourrait être renouvelée régulièrement, avec de nouvelles initiatives face à des attentes de plus en plus grandes, tant de la part des médecins que de la part des patients. « Quand vous commencez à écouter les signaux de votre corps, rappelait d’ailleurs Uwe Diegel, vous avez envie d’en écouter de plus en plus et d’adapter votre comportement à une démarche de santé globale ». Ses tensiomètres, ses glucomètres et ses balances connectés ont fait sa réputation et sa fortune, mais il développe aussi des produits peut-être moins fondamentaux. L’une de ses sociétés, « iBaby », proposera bientôt une app permettant d’enregistrer les battements de cœur des fœtus dans le ventre de leur mère, « qu’elles pourront mettre ensuite sur Facebook ». Mais il assure surtout son public que, dans un an au plus tard, le marché des apps santé aura enfin pris son essor en France, pour devenir réellement incontournable.
(1) Les apps développées lors du « hackathon » peuvent être retrouvées sur son site Internet : www.digitalhealthcamp.eu
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