Instauré en 2018, le Règlement général sur la protection des données (RGPD) a créé des obstacles au partage des données de santé pour la recherche internationale, déplore un rapport conjoint de la Fédération européenne des Académies des sciences et des humanités (ALLEA), le Conseil consultatif scientifique des académies européennes (EASAC) et la Fédération européenne des Académies de médecine (FEAM).
Des problèmes juridiques entre la législation d'autres pays et les droits fondamentaux de l'Union européenne (UE) affectent le partage des données de santé avec des chercheurs en dehors de l’UE/Espace économique européen (EEE), y compris ceux du secteur public. « Il n'existe actuellement aucun mécanisme juridique viable vers lesquels se tourner pour le partage des données de santé dans le domaine de la recherche publique », insistent les auteurs du rapport, qui estiment qu'en 2019, plus de 5 000 projets ont été concernés pour la seule collaboration entre les pays d'Europe et les Instituts américains de la santé (NIH).
Face à ce constat préjudiciable pour la recherche, le rapport invite décideurs politiques et législateurs européens à « surmonter les obstacles » et juge « urgent de trouver une solution, tant pour les collaborations de recherche en cours que pour les nouvelles études ».
Un défi juridique, mais aussi technique
Sans remettre en cause le principe de protection des données personnelles, ils réclament une solution « adéquate et sûre » qui ne soit pas « en conflit avec les lois américaines ou celles d’autres pays ». Ils souhaitent des directives accompagnées d’exemples « tangibles » adaptés au secteur de la santé, y compris « sur la façon dont les transferts existants et en cours peuvent se poursuivre ».
En l’absence de solution pérenne, les chercheurs pourraient être tentés de contourner le RGPD « en qualifiant de données anonymisées celles qui ne le sont pas, ou en essayant d'obtenir une dérogation au titre de l'article 49, donnant moins de protection au sujet fournissant des données personnelles », avertissent les auteurs.
À côté du défi juridique, ils pointent également la nécessité de résoudre des problèmes méthodologiques et techniques pour permettre l'interopérabilité dans l'utilisation des données. « Ces défis nécessitent une plus grande attention de la communauté de la recherche », est-il souligné.
Actionner les voies diplomatiques
Dans la même optique, les auteurs préconisent la création d’un mécanisme de suivi des évolutions technologiques en la matière, « peut-être au moyen d'une plateforme interdisciplinaire qui aiderait également à la sensibilisation du public aux réalisations européennes et aux enjeux dans la région », est-il suggéré. Les académies pourraient « aider à catalyser le début de cette nouvelle fonction, mobilisant les chercheurs et bailleurs de fonds de la recherche dans une discussion plus large avec décideurs politiques et autres parties prenantes », poursuivent-ils.
Plus largement, les auteurs jugent que les « politiciens européens devraient également être plus actifs pour résoudre les problèmes pertinents au niveau international par les voies diplomatiques », pointant notamment la législation américaine sur le renseignement affectant les données de recherche. « Un problème qui ne peut pas être résolu au sein de l'UE », rappellent-ils, insistant sur une nécessaire discussion mondiale en faveur d’une réciprocité dans le partage des données.
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