« Je m’excuse des termes très très excessifs que j’ai utilisés à l’encontre des allergologues dans le livre que j’ai coécrit avec le Pr Bernard Debré, "Le Guide des 4 000 médicaments, utiles, inutiles ou dangereux". J’ai négligé leur dévouement, c’est une faute, les allergologues sont juste des victimes de ceux qui leur dispensent leur enseignement. (...) Je ne suis pas choqué d’avoir été sanctionné » par la juridiction ordinale.
Gourous, charlatans
Ces propos plutôt inattendus ont été tenus ce mercredi par le Pr Philippe Even dans le cadre de la procédure d’appel de la décision de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre (17 mars 2014).
Notamment traités de « gourous » et de « charlatans » dans l’ouvrage incriminé, près de 300 allergologues avaient porté plainte devant la juridiction ordinale contre les deux auteurs du livre. L’Ordre de Paris s’était associé à la plainte déposée, ainsi que le Dr Alain Choux, généraliste (MEP) parisien. Ce dernier contestait les allégations des auteurs sur les statines, accusées d’enrichir les laboratoires plutôt que de soigner les patients.
Tous deux condamnés à un an d’interdiction d’exercer la médecine dont 6 mois avec sursis, les Prs Debré et Even avaient fait appel de ce jugement. Un appel auquel se sont associés les allergologues, l’Ordre de Paris et celui du Nord, tous soucieux de voir au minimum la même sentence infligée en deuxième instance.
Le Dr Choux s’y était également associé, jugeant la peine initiale... insuffisante au regard des propos tenus, et demandant la radiation pure et simple des deux professeurs.
Propos péremptoires
Ce 21 octobre, Philippe Even a endossé la responsabilité des passages incriminés. Il précise que tant le chapitre sur les allergologues que celui sur les statines ont entièrement été rédigés par lui.
Mais le Pr Bernard Debré s’est lui aussi exprimé. L’urologue se dit ému de sa condamnation à six mois d’interdiction d’exercice, qui le prive de l’action humanitaire et bénévole qu’il projetait de mener prochainement à l’étranger. Un des avocats de la partie adverse lui rappelle sèchement que l’interdiction d’exercer la médecine ne s’applique précisément pas à ce type d’action bénévole.
Bernard Debré s’explique. « Sur l’allergologie, j’aurais dû faire attention à ce qu’avait écrit Philippe Even, mais je suis solidaire. Les propos étaient certes péremptoires, mais il fallait l’être, c’était notre devoir ». Le médecin veut croire que, « grâce au livre », certains médicaments dangereux « comme Diane 35 et d’autres » ont été retirés de la vente.
Des excuses du bout des lèvres
De tous les avocats présents, Me Antonin Lévy, avocat du Syndicat français des allergologues (Syfal), est le plus virulent. Il regrette qu’il ait fallu trois ans pour obtenir « du bout des lèvres » des excuses du Pr Even « pour ses propos abjects ».
Il bat en brèche la défense des accusés, qui prétendent s’être comportés en lanceurs d’alerte face aux risques supposés que feraient courir les statines. « Un lanceur d’alerte, fait-il valoir, ça alerte les autorités. Vous, vous n’en avez alerté aucune, vous avez juste écrit un livre ».
Le jugement a été mis en délibéré.
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