Algues vertes

De dangereuses émanations

Publié le 12/09/2011
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EN AOÛT, 36 sangliers, 3 ragondins et un blaireau ont été découverts morts en baie de Morieux, dans l’estuaire du Gouessant, en Bretagne, une zone particulièrement envahie par les algues vertes et où plusieurs cadavres d’animaux avaient déjà été trouvés en juillet. Chargée par le ministère de l’Écologie de mesurer les niveaux de concentration en hydrogène sulfuré (H2S) liés à la fermentation des algues, l’INERIS (Institut national de l’environnement industriel et des risques) a relevé des valeurs au sol de plus de 3 000 mg/m3 et de 15 à 140 mg/m3 sur les détecteurs placés à la hauteur de la taille des opérateurs. Dans l’air ambiant, les concentrations sont de 5 à 75 fois supérieures à la valeur témoin locale (mesurée dans une zone sans algues) de 2,9 µg/m3, elle-même un peu supérieure aux valeurs mesurées ailleurs en France (de 0,15 à 0,45).

L’INERIS estime que les concentrations auxquelles sont exposés les riverains pendant environ quatre mois (la saison d’échouage des algues va de juin à septembre) sont inférieures à 30 µg/m3, la valeur de référence de l’agence ad hoc du ministère américain de la Santé (Agency for Toxic Substances and Disease Registry). Il n’y aurait donc pas de risque préoccupant pour la santé, sinon des perturbations olfactives, en ce qui concerne cette exposition subchronique. Quand à une exposition aiguë à des concentrations très élevées, pouvant atteindre les seuils mortels (2 408 mg/m3 pour une exposition d’une minute), au niveau du sol ou dans les dépôts d’algues, elle est peu probable, mais la survenue d’un accident ne peut être écartée : enfant jouant dans le sable, chute grave…

Mise en danger de la vie d’autrui.

L’Agence de sécurité sanitaire de l’environnement (ANSES) estime elle aussi que la mort des animaux, atteints pour la plupart d’œdème pulmonaire, avec une corrélation entre le tableau lésionnel et les concentrations en H2S dans les poumons, est due à une intoxication par le sulfure d’hydrogène, même s’il ne s’agit pas du seul facteur en cause. Elle préconise cependant des travaux complémentaires, dont la recherche de cyanotoxines dans les organes des animaux morts.

Ces études confirment en tout cas la responsabilité des algues vertes, dont la prolifération est favorisée par les rejets azotés agricoles. Le plan Algues mis en place l’an dernier sera long à porter ses fruits. En attendant, les associations Sauvegarde du penthièvre et Sauvegarde du Trégor ont annoncé le dépôt d’une plainte pour mise en danger de la vie d’autrui dans l’estuaire du Gouessant.

R. C.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9001