« LA CATASTROPHE ANNONCÉE n’a pas eu lieu », constate le député UMP Guy Lefrand, coauteur avec son homologue Serge Blisko (groupe socialiste radical citoyen) d’un rapport d’évaluation des six premiers mois du nouveau dispositif de soins psychiatriques sans consentement. « En dépit de quelques ratés, les saisines des juges des libertés et de la détention (JLD) ont dans l’ensemble pu être réalisées dans les délais prescrits par la loi et les juges ont pu se prononcer sur les mesures de soins psychiatriques sans consentement dès le 1er août », date d’entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 2011. Selon un premier bilan encore provisoire émanant du ministère de la Justice, 30 181 saisines du JLD ont été recensées depuis six mois dont 1 253 recours facultatifs. S’agissant de la nature des décisions de justice, 82,3 % d’entre elles à six mois sont des maintiens de mesures de soins psychiatriques sans consentement (4,5 % ordonnent la mainlevée, 2,2 % une expertise et 11 % sont des décisions de procédure). Les saisines tardives - effectuées entre le 12e et 15e jour d’hospitalisation (ou durant la première semaine précédant la période de six mois d’hospitalisation) - représentent 1,3 % du total. « Les conséquences sont très graves et débouchent sur une mainlevée de la mesure de soins sans consentement », remarque Guy Lefrand.
Quant à leur lieu, les audiences sont organisées au tribunal dans plus de 75 % des cas. Seulement 5,7 % d’entre elles se déroulent par visioconférence. « Quand les audiences ont lieu au TGI, les patients ne sont pas toujours transportés pour y participer parce qu’ils font l’objet d’un certificat médical précisant que leur état ne leur permet pas d’être entendus. Le motif peut être médicalement fondé ou constituer un prétexte à une impossibilité matérielle ou de principe au déplacement du patient », indique Guy Lefrand.
Réflexions sur le secret médical.
Lorsque les patients se déplacent au tribunal, les conditions matérielles d’accueil sont rarement adaptées, souligne le rapport. Si la présence de l’avocat est « quasiment systématique » le rôle de ce dernier reste à préciser car il apparaît à ce jour « très limité », du fait du peu de contact avec le patient. « Nous considérons qu’il faut généraliser le plus possible la pratique des audiences à l’hôpital. Il faut être volontariste sur cette question et demander au juge de se déplacer. Il en va du respect et de la dignité du patient », déclare Guy Lefrand. Pour la secrétaire d’État à la Santé, Nora Berra, « la question d’inscrire l’obligation de l’audience du juge à l’hôpital n’est pas opportune » car « il faut laisser de la souplesse aux acteurs de terrain en fonction des spécificités locales ».
Même en chambre du conseil (salle réservée aux audiences non publiques), « la question du secret médical doit être posée ». Bien que le principe du débat contradictoire soit important pour la Justice, « il n’implique pas à notre avis la lecture in extenso des certificats médicaux à l’audience », estiment les députés. « Une réflexion devrait être initiée du côté des médecins sur les contenus des certificats et avis destinés au JLD tant du point de vue du respect du secret médical que de l’utilité de l’information transmise au juge », suggèrent-ils. « Si beaucoup a été fait pour que la réforme soit mise en œuvre le mieux possible sur le terrain, l’application de la loi reste toutefois très inégale », remarque Serge Blisko. Chaque territoire a une manière de l’appliquer en fonction de ses contraintes locales. « Tout dépend de la bonne volonté des acteurs sur le terrain et des moyens mis à leur disposition », ajoute-t-il. « Un projet de circulaire prévoit des crédits de dotation annuelle de fonctionnement à hauteur de 6,72 millions d’euros pour financer l’installation de la visioconférence ; 10,23 millions d’euros pour les personnels assurant l’accompagnement des patients aux audiences et 100 000 euros pour les quatre cliniques privées assurant les soins sans consentement », précise Nora Berra.
Trop de certificats.
Pour le prochain concours de la magistrature, 270 postes seront ouverts en 2 012 mais tous n’auront pas à traiter des dossiers de contrôles de soins psychiatriques sans consentement. Avec l’entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 2011, les saisines judiciaires ont engendré une multiplication des certificats médicaux. Le rapport recommande de « constituer un groupe de travail sur les certificats médicaux en vue de proposer une réduction de leur nombre compatible avec le respect des droits des patients ». Les parlementaires préconisent par ailleurs de « prévoir la possibilité pour les patients en hospitalisation complète de bénéficier de sorties thérapeutiques de très courte durée » sans nécessairement être accompagnés ou faire l’objet de programmes de soins hors hospitalisation complète. Lors de son audition mercredi en commission des Affaires sociales, Nora Berra a annoncé la mise en place d’un « comité de suivi » qui sera « attentif aux difficultés de mise en œuvre de la loi ».
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