« La fibromyalgie est une maladie. Aux personnes qui souffrent, il faut dire que les députés, la nation, reconnaissent leur douleur », a indiqué le député gauche démocrate et républicaine Patrice Carvalho, en présentant ce 12 octobre les conclusions du rapport de la commission d'enquête, créée le 10 mai 2016. « Nous ne sommes ni des médecins, ni des scientifiques, mais nous avons mené une enquête et vu qu'il y a un problème de santé publique », a ajouté la socialiste Sylviane Bulteau.
À l'issue d'une vingtaine d'auditions, et d'un recueil de témoignages où – aux dires du rapporteur, a éclaté un immense besoin de reconnaissance de la part des patients, la commission propose 20 propositions, dont la première est de substituer le mot maladie au mot syndrome. « Le fait que les médecins parlent de syndrome ne contribue pas à crédibiliser la souffrance subie par les patients auprès de leurs proches et de leur entourage professionnel », a indiqué Patrice Carvalho.
En deuxième lieu vient la nécessité de renforcer l'effort de recherche, notamment en augmentant le nombre de programmes hospitaliers de recherche clinique (PHRC). Causes, prévalence (on estime qu'entre 1,2 million et 2 millions de personnes seraient concernées), coût, épidémiologie et même traitements restent méconnus, regrettent les députés, précisant qu'il n'est possible d'attendre la restitution de l'expertise de l'INSERM, en 2018. « Il n'y a pas de concurrence entre nos deux démarches, mais bien une complémentarité », note Patrice Carvalho. Il propose en outre d'intégrer les conclusions de l'INSERM dans les diagnostics territoriaux partagés instaurés par la loi Santé de janvier 2016.
Améliorer la formation et créer un parcours de soins
Une série de propositions visent à limiter l'errance diagnostique des patients, en améliorant la formation des médecins. Pour ce faire, la réforme du troisième cycle des études de médecine devrait intégrer la médecine de la douleur comme spécialité universitaire, ou comme formation transverse commune à plusieurs DES. Un enseignement sur la fibromyalgie devrait être inclus dans le DPC. Les tests de diagnostic doivent être diffusés via le site Améli et les logiciels d'aide à la prescription, tout comme l'annuaire national recensant les structures de douleur chronique (SDC).
S'inspirant des travaux du Pr Serge Perrot à l'hôpital Cochin, la commission suggère de développer les programmes d'éducation thérapeutique du patient. Toujours pour éviter des traitements médicamenteux lourds (comme les neuroleptiques), avec effets indésirables, elle entend encourager une approche pluridisciplinaire de la prise en charge des patients. Concrètement, les députés renvoient la balle à la HAS - aussi saisie par la CNAM depuis le 16 juin - pour élaborer un référentiel de bonnes pratiques, base d'un parcours de soins et de prise en charge de la douleur, qui soit diffusé notamment aux médecins-conseils de la CNAM, aux MDPH, aux comités médicaux des administrations – de manière à lutter contre les inégalités territoriales.
« Il importe que la reconnaissance de l'ALD soit garantie aux cas sévères et coûteux en soins, de manière homogène sur le territoire », a précisé Patrice Carvalho.
Des amendements lors du PLFSS 2017
La HAS devrait aussi définir un panier de soins complémentaires (balnéothérapie, psychologue, activités de retour à l'effort, voire, compléments alimentaires, hypnose) éligible à une prise en charge (peut-être forfaitaire). « Nous allons proposer des amendements en ce sens dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS 2017) », a précisé Sylviane Bulteau.
Autre mesure susceptible d'être proposée lors des discussions autour du PLFSS 2017, l'inclusion de la fibromyalgie dans la liste des pathologies complexes ouvrant droit à une majoration de tarification pour les consultations des généralistes, prévue dans la nouvelle convention médicale.
Enfin, les députés proposent de mettre en place un forfait de coordination dans le cadre des parcours de soins, et de relancer le 4e plan national de lutte contre la douleur – ce qui est du ressort réglementaire, selon Sylviane Bulteau.
Les députés ne se sont pas penchés sur le coût éventuel de leurs propositions « mais l'errance diagnostique, avec la multiplication d'examens coûteux, a aussi un coût non négligeable », a souligné la députée socialiste. Leur rapport sera disponible in extenso le 18 octobre.
Les associations attendent des mesures concrètes
Le collectif Fibro'Actions a salué les conclusions de la commission d'enquête, « une véritable avancée pour les patients, de nature à faire changer les choses », selon les mots du vice-président Nicolas Vignali. « Parler de Maladie devrait permettre de sensibiliser tout le monde, à commencer par les médecins, espère-t-il, mais aussi les MDPH, dont les grilles ne sont pas adaptées aux fibromalgiques, les médecins conseils, qui connaissent mal notre situation, et entrent parfois en conflit avec les médecins du travail ou encore les proches ».
« Nous attendons désormais la réaction de la ministre de la Santé », indique Nicolas Vignali. Quant à l'expertise de l'INSERM, « elle devrait apporter les preuves scientifiques et la crédibilité qui rendront impossible toute négation de la maladie », conclut-il.
De son côté, l'association Fibromyalgie France attend de pouvoir lire le rapport in extenso pour se prononcer et mesurer les nouveautés apportées. « Pour l'instant, les conclusions reposent sur de l'existant, ne serait-ce qu'à petite échelle. Néanmoins, ces heures d'audition ont permis de mettre en lumière le vécu des personnes fibromyalgiques et de créer ainsi une prise de conscience, tout en soulevant des contradictions », estime pour l'heure sa présidente Carole Robert.
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