LES FRANÇAIS n’ont pas trouvé chez le président les mots et les actes qui les auraient rassurés en cette période d’indispensables sacrifices. Sa gouvernance a été privée de ce dialogue direct avec le peuple qu’en leur temps Roosevelt et Mendès-France avaient su nouer avec leurs mandants. La principale raison du fossé entre gouvernants et gouvernés réside dans l’usage démesuré de la communication : alors que la publicité mensongère est interdite, nos politiques, et pas seulement ceux de droite, truquent leur discours, qu’il s’agisse d’une rigueur inéluctable mais que François Fillon vient à peine de nommer, ou d’approximations factuelles dans un entretien télévisé du chef de l’État. Au devoir sacré de réforme, il a manqué d’une part une meilleure concertation avec ceux qui s’y opposent (même s’ils sont animés par un furieux conservatisme) et des explications plus complètes. Même à propos de la réforme des retraites, qu’on ne saurait récuser sans sombrer dans la déraison, le gouvernement a plus bousculé les syndicats et la gauche qu’il n’a tenté sincèrement de les convaincre.
Un manque de subtilité.
M. Sarkozy est arrivé au pouvoir avec une volonté réformatrice beaucoup plus profonde que celle de ses prédécesseurs. Il a voulu extirper du subconscient national l’aversion pour l’argent et une idéologie égalitaire qui conduit à l’affaissement de la croissance. Son sincère pragmatisme a donc été teinté par l’exaltation de valeurs nouvelles auxquelles le pays n’était pas préparé. Il fallait, pour que les Français admettent un tel changement, une subtilité dont le président est dépourvu et un langage plus élevé et moins partisan. Il a donc jeté dans la fosse aux lions les hommes et les femmes recrutées au nom de l’ouverture et qui ne s’en remettront jamais. Il a fait du mot rupture, thème qui nous semblait bien inspiré, une sorte d’anathème. En outre, la crise économique et financière, à laquelle il a fort bien réagi et contre laquelle il nous a tous remarquablement protégés (en dépit des critiques outrancières de l’opposition) méritait non seulement une explication de texte mais un revirement par rapport aux mesures adoptées pendant l’été 2007, notamment en ce qui concerne le bouclier fiscal. On ne s’empêchera pas de penser toutefois que si le dialogue politique ne se résumait pas en France à une politique du lance-pierres, la gauche aurait peut-être obtenu, avec un peu de discrétion, les réajustements que la crise rendait nécessaires.
LE COMPORTEMENT DU PRÉSIDENT EST L’ÉLÉMENT LE MOINS IMPORTANT ET LE PLUS DÉVASTATEUR DE LA CRISE POLITIQUE
Le comportement personnel du président, dans ce contexte, aura été à la fois l’élément le moins important et le plus dévastateur. L’opposition et la presse se sont concentrées avec délectation et fureur contre des initiatives, des mots, des gestes qui, sans être dommageables à la politique générale du gouvernement, ont porté à la crédibilité du chef de l’État un coup mortel. Le péché originel, c’est bien sûr la soirée du Fouquet’s qui a choqué une majorité de Français et dont on mesure aujourd’hui l’impact tant les commentateurs y font référence encore aujourd’hui. Du Fouquet’s à l’affaire Bettencourt, il n’y a eu qu’un pas à franchir. Du coup, ce pouvoir-là, plus qu’un autre, semble irrémédiablement associé aux grandes fortunes. Curieusement, M. Sarkozy ne semble pas avoir compris que dans un pays où le taux de chômage atteint 10 % et où la précarité est répandue, sa leçon magistrale fondée sur le principe suivant : l’argent n’est l’ennemi de personne, c’est un vecteur de croissance, s’adressait à un peuple sourd.
Si le temps de l’été ne compte pas en politique, Nicolas Sarkozy ne dispose plus que de dix-huit mois pour remonter la pente. C’est peu. Pourtant, ce serait suffisant si les perspectives de croissance étaient meilleures et si nous avions la garantie qu’il n’y aura plus de scandale. Mais d’une part, l’économie française est de toute évidence essoufflée ; et d’autre part, M. Sarkozy et son entourage ne se sont jamais amendés pendant les trois premières années de son mandat ; et on ne voit pas comment, si un débat politique tonitruant n’a pas porté ses fruits à ce jour, la conduite du pouvoir pourrait enfin échapper à la frénésie, aux contradictions, aux excès de langage qui l’ont caractérisée jusqu’à présent. En réalité, la majorité actuelle ne dispose que d’un atout : bien que la gauche ait été réorganisée à la fois grâce à la prise en main du PS par Martine Aubry et aux conquêtes électorales des Verts, elle n’a pas atteint elle-même le seuil critique de crédibilité. Elle n’a pas davantage reconnu que la réforme est indispensable. Elle dit qu’elle est pour les réformes, mais pas celles-là, ce qui est l’excuse éternelle pour ne rien faire. En d’autres termes, le clivage droite-gauche demeurant profond dans les discours mais à peu près inexistant au niveau des nécessités, beaucoup d’électeurs se demanderont peut-être pourquoi ils devraient se lancer dans une nouvelle aventure. Bref, M. Sarkozy, avec un peu de chance, un peu de croissance, un peu de l’habileté qu’il avait en 2007, pourrait gagner par défaut. S’il en a déçu plus d’un un, il reste en effet fortement associé à l’idée de réforme, de changement, de dynamisme, toutes choses qui auront cours de nouveau quand nous sortirons de la crise. À ce jour, en revanche, nous ne savons toujours pas comment la gauche pourrait à la fois réduire le chômage et changer les structures du pays. Un pays qui a énormément besoin d’un homme (ou une femme) d’État. Cet homme d’État que M. Sarkozy, en définitive, n’a pas su être.
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