« C’ÉTAIT TRÈS, très long ». Tels furent les premiers mots du Dr Jean-Luc Wagler mardi soir vers 20 h 30, au sortir d’une prise d’otage de 11 heures par un détenu. Âgé de 37 ans, ce dernier avait été condamné à deux ans de détention pour escroquerie à la Sécurité sociale dans le cadre d’un trafic de Subutex. Après trente années d’exercice classique en médecine générale, le Dr Wagler s’était engagé depuis deux ans dans la médecine carcérale. Mardi vers 9 h 30, le détenu se rend à l’infirmerie de l’établissement pour une consultation médicale. Malgré la fouille des surveillants, il parvient à entrer dans le local avec une sorte de couteau fabriqué par ses soins. Tandis que les surveillants patientent dans le couloir à l’entrée de l’infirmerie, il se sert de cette arme blanche artisanale pour retenir en otage le médecin. Kathy Soriano, cadre de la santé à l’Unité de consultation et de soins ambulatoire (UCSA) au centre de détention de Montmédy témoigne.
« Quand la prise d’otage a commencé dans le bureau médical au tout début de la consultation, j’étais dans la salle d’à côté. Il y eut un haussement de ton. Je suis arrivé rapidement. Le détenu avait déjà maîtrisé le docteur. Il a demandé aux personnes présentes de quitter la pièce, ce que nous avons fait immédiatement. Puis à partir du moment où l’on a respecté le souhait du détenu, tout s’est passé dans le calme. » Présenté comme quelqu’un de très posé, le praticien a parfaitement maîtrisé une situation d’autant plus délicate que le preneur d’otage n’avait formulé aucune revendication précise. Après de longues négociations avec le GIGN dépêché sur place, l’homme s’est finalement rendu sans condition.
Incarcéré depuis le 26 juillet et libérable en 2013, le preneur d’otage a été placé en garde à vue avant d’être hospitalisé dans une chambre sécurisée pour la nuit. Il devait être examiné mercredi par un expert psychiatre afin de déterminer si celui-ci est pénalement responsable. Dans l’affirmative, il risquerait alors trois années d’emprisonnement supplémentaires.
Ambiance tendue.
Implanté sur le site d’une ancienne caserne militaire, le centre de détention de Montmédy accueille actuellement 290 détenus pour une capacité totale de 328 personnes. Pour Kathy Soriano, l’ambiance au sein de l’établissement s’est fortement dégradée ces dernières années. « Depuis deux ans, nous voyons la population pénale changer, avec l’arrivée de peines plus courtes et un certain non-respect récurrent de l’institution (déchets, augmentation de la violence parmi les détenus). Les profils ont complètement changé, ce qui génère un climat d’insécurité pour nous soignants », explique-t-elle. Quant à l’UCSA, sa position géographique au sein de l’établissement pose problème : « L’unité se situe au bout du centre de détention. Cela veut dire que pour y accéder, nous devons traverser toute la zone de détention. Nous côtoyons chaque jour les détenus en libre accès à notre venue et notre sortie à l’UCSA. On peut très bien se retrouver au milieu d’une quinzaine de détenus durant le cheminement, ce qui est très difficile pour les professionnels. »
L’entrée d’un prisonnier au sein de l’infirmerie avec un objet dangereux n’est en outre pas une première. « Des détenus ont déjà pénétré l’UCSA avec des lames de rasoir mais nous n’avons jamais eu d’agression physique », souligne Kathy Soriano. Suite à la prise d’otage, une mesure de prévention a été mise en place dès mercredi avec désormais l’usage systématique de détecteur de métaux lors de la fouille d’entrée à l’UCSA.
Hormis un urgentiste réalisant deux vacations mensuelles, le Dr Jean-Luc Wagler est le seul médecin à exercer au quotidien au sein de l’UCSA du centre de détention de Montmédy. Fatigué après cette longue prise d’otage, le médecin souhaite tourner la page au plus vite. « Il voulait reprendre dès le lendemain ! C’est nous qui l’avons poussé à prendre une journée de repos. Son souhait était de rencontrer rapidement l’équipe paramédicale car tout le monde l’a attendu jusqu’au dénouement ». Jeudi, le Dr Wagler devait normalement reprendre ses fonctions à la prison de Montmédy.
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