AU 9e JOUR de son procès, les déclarations faites à la police au lendemain du décès de Michael Jackson par le Dr Conrad Murray ont été rendues publiques. Le médecin y affirme que la star de la pop était un grand habitué du propofol, anesthésique de courte durée d’action, lorsqu’il est entré à son service en mai 2009. « Il connaissait les dosages », a-t-il déclaré. C’est face à l’insistance de son patient que le Dr Murray s’est résolu, dit-il, à lui fournir et lui administrer le propofol, « quasiment tous les jours » sauf les 3 jours précédant la mort lorsqu’il tente de le sevrer. « Je voulais qu’il dorme plus naturellement », a-t-il indiqué, expliquant avoir réduit les doses de propofol qu’il a remplacé par des sédatifs.
Dans la nuit précédant son décès, le 25 juin, Michael Jackson, alors en pleine répétition de son prochain spectacle, se serait de nouveau plaint d’insomnie : « Il faut que je dorme », lui aurait-il dit. Après avoir tenté de lui administrer différents sédatifs, sans succès, le Dr Murray finit par administrer du propofol. « J’ai pris toutes les précautions, j’ai vérifié qu’il y avait de l’oxygène près du lit, l’appareil pour prendre le pouls », a-t-il plaidé, reconnaissant être sorti de la chambre pendant 2 minutes pour « aller aux toilettes ». À son retour, le patient « ne respirait plus ». Le Dr Murray dit avoir « tout de suite cherché le pouls. Son corps était chaud, il n’avait pas changé de couleur. J’ai commencé immédiatement à pratiquer un massage cardiaque ». Mais il doit l’interrompre pour chercher lui-même de l’aide au rez-de-chaussée, l’assistant du chanteur ne répondant à ses appels. Il reprendra le massage cardiaque après avoir demandé à un agent de sécurité d’appeler les urgences. Il sera trop tard. Quant à la cause de la mort, « une grave intoxication au propofol », le Dr Murray, par la voix de ses avocats, a d’abord plaidé l’auto-ingestion par le patient lui-même d’une dose supplémentaire, avant d’abandonner cette thèse.
Absence d’éthique.
Les médecins qui se sont succédé à la barre ces derniers jours ont souligné les failles du récit, dressant un portrait peu flatteur du Dr Murray. Le Dr Christopher Rogers, le médecin légiste qui a réalisé l’autopsie, a confirmé la mort par intoxication au propofol combiné aux effets des sédatifs lorazepam et midazolam. Interrogé sur sa décision de qualifier la mort de la pop star d’homicide, il a affirmé que « les circonstances ne peuvent appuyer l’auto-administration ». Il aurait fallu, a-t-il poursuivi « que Michael Jackson se lève, alors qu’il était déjà sous l’influence du propofol, qu’il ait été capable de se l’administrer, que le propofol fasse son effet, et qu’il arrête de respirer, tout cela en deux minutes ». Le médecin émet l’hypothèse plus probable d’un surdosage. Selon lui, le propofol « n’est pas le médicament approprié » pour traiter l’insomnie et surtout à domicile. Le Dr Murray aurait dû donner à son patient « à intervalles réguliers, l’équivalent de 2 ou 3 cuillers à soupe de propofol par heure », a-t-il estimé avant d’observer qu’aucun appareil permettant un dosage précis ne se trouvait dans la chambre.
Le Dr Alon Steinberg, cardiologue, assurait quelques jours plus tard, que « Michaël Jackson aurait pu être sauvé » si son médecin n’avait pas fait preuve de « graves négligences ». Selon lui, le Dr Murray a enchaîné les erreurs, dont la plus manifeste, celle de ne pas avoir immédiatement appelé les secours. « Quand il a vu Michael Jackson dans cet état, il aurait dû se dire : je n’ai pas l’équipement, je n’ai pas les médicaments, je n’ai pas le personnel et appeler immédiatement le 911 (le numéro d’urgence aux États-Unis). Au lieu de cela, il a appelé l’assistant (du chanteur) », a-t-il déploré.
Le Dr Nader Kamangar, spécialiste des soins intensifs, a, lui, qualifié « d’inconcevable » l’utilisation du propofol hors d’une surveillance étroite en milieu médical. Il a dénoncé « l’absence d’éthique » du Dr Murray, qui a institué un traitement sans avoir au préalable rechercher la cause de l’insomnie et a utilisé du propofol chez un patient qui, semble-t-il, « avait des problèmes de dépendance aux médicaments », ce qui va à l’encontre de tous les « standards de soins ». La décision appropriée « dans un tel cas, a-t-il précisé, est de faire évaluer le patient par un expert, de consulter un psychiatre, de traiter l’anxiété » à l’origine de l’insomnie. Avoir tenté de traiter une insomnie en administrant du propofol reste pour lui, « incompréhensible » : « Cela ne se fait même pas en milieu hospitalier », a-t-il conclu.
Le procès prévu pour six semaines se poursuit. Le Dr Murray risque jusqu’à quatre ans de prison.
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