L’intervention du pape François sur les orientations homosexuelles constatées par les parents chez les moins de 20 ans fait vivement réagir les psychiatres français. Interrogé dans l’avion qui le ramenait d’Irlande à Rome, Jorge Bergoglio a estimé qu’il fallait tenir compte de l’âge des personnes. « Quand cela se manifeste dès l’enfance, il y a beaucoup de choses à faire par la psychiatrie, pour voir comment sont les choses. C’est autre chose quand cela se manifeste après vingt ans », a déclaré le souverain pontife, déclenchant les protestations des spécialistes interrogés par « le Quotidien ». « Pour nous, pédopsychiatres, l’âge qui fait césure dans le développement de la personne correspond à la puberté et pas du tout à la vingtaine, explique le Pr Gisèle Apter (CH du Havre), présidente de l’ASIP (Association d’information en psychiatrie). Fixer une limite à 20 ans, c’est faire preuve d’une méconnaissance scientifique totale. Cette prise de parole médicalement vaseuse est très grave, à la mesure de son retentissement mondial, car elle va aggraver la souffrance d’adolescents et de parents qui peuvent être déjà déroutés par le choix des objets sexuels. »
« Le pape vient d’envoyer un message très clair au monde, confirme le Dr Serge Hefez, autre pédopsychiatre : l’homosexualité est une maladie, une folie que les parents doivent faire soigner par les médecins. Il s’agit d’un retour en arrière particulièrement néfaste pour des enfants que l’on fait ainsi se regarder comme des monstres. »
Refus d’une psychiatrie normative
« Avec de tels propos, nous nous retrouvons renvoyés à un autre âge, plus de trente ans en arrière, estime encore le Dr Bertrand Lavoisy, membre du bureau du Syndicat national de la psychiatrie hospitalière (SNPH), qui rappelle que « l’homosexualité ne figure plus sur la liste des maladies mentales de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) depuis 1990 et que la France l’en a retiré dès 1981. Envoyer les jeunes homosexuels chez le psychiatre, cela revient dans l’esprit public à les traiter comme des fous, comme si les médecins devaient être chargés de les remettre sur le droit chemin sexuel, selon une psychiatrie normative ».
« Après les politiciens qui veulent psychiatriser la radicalisation, voici un responsable religieux qui veut psychiatriser l’orientation sexuelle, au moment où son institution défraye l’actualité par ses propres frasques sur le plan sexuel, renchérit le Dr Michel David, vice-président du SNPH. Aucun psychiatre ne saurait accepter pareil discours. »
Plus circonspect, le psychiatre et psychanalyste Serge Tisseron souhaite que le pape s’exprime plus clairement : « A-t-il voulu dire que les psychiatres devaient remettre les adolescents attirés par des partenaires de leur propre sexe dans le droit chemin ? Ou bien pense-t-il qu’il faut les soutenir dans les situations familiales et sociales difficiles qu’ils peuvent rencontrer ? Son propos est trop laconique pour que nous puissions abonder dans l’une ou l’autre option. »
Quoi qu’il en soit, conclut – momentanément –, le Pr Michel Lejoyeux (Bichat-Claude-Bernard), « l’homosexualité, quel que soit l’âge de la personne concernée, n’est pas un motif de consultation puisque la psychiatrie ne traite que les maladies reconnues par la classification des pathologies mentales. Tout propos allant à l’encontre du consensus scientifique sur la question est hors sujet et ne mérite pas de faire polémique. »
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