L’entérovirus EV-D68, un virus rare, proche de celui de la poliomyélite, pourrait être lié au développement de paralysies flasques aiguës (PFA) chez les enfants, selon une étude américaine publiée dans le journal « The Lancet ». Les 12 cas de PFA décrits dans l’étude et observés chez des enfants âgés de 1 à 18 ans, sont tous survenus entre le 1er août et octobre 2014 au Children’s Hospital du Colorado à Aurora, aux Etats-Unis, alors que la région faisait face à une épidémie d’entérovirus EV-D68. Ce dernier, EV-D68, appartient à la même famille que la poliomyélite mais habituellement ne provoque pas de symptômes similaires. L’infection se manifeste par des symptômes proches de ceux du rhume ou de la grippe : toux, fièvre, douleurs musculaires, respiration sifflante et difficultés respiratoires.
Des lésions de la moelle épinière et du tronc cérébral
Les enfants se sont présentés aux urgences avec des degrés de faiblesse musculaire variable atteignant les bras ou les jambes, des difficultés à avaler et des paralysies faciales. Tous avaient de la fièvre et des symptômes respiratoires environ une semaine avant que les symptômes neurologiques ne commencent. Les examens IRM realisés par l’équipe médicale ont révélé que dix d’entre eux présentaient des lésions de la moelle épinière et neuf des lésions du tronc cérébral. « Au cours des quatre dernières années, notre hôpital a vu un maximum de quatre cas similaires dans une période de trois mois, où les enfants perdent l’usage d’un, deux bras ou des jambes. Ces douze cas sont trois fois plus nombreux que les années précédentes », explique le Dr Samuel Dominguez, auteur principal et épidémiologiste microbienne au Children’s Hospital Colorado. Un à deux mois après l’apparition des symptômes neurologiques et malgré les traitements reçus, tous les enfants ont présenté des troubles moteurs persistants.
Une complication rare ?
Très peu d’études sur l’entérovirus existent à ce jour. Si le lien entre entérovirus et PFA étaient établis, les troubles neurologiques pourraient correspondre à une complication très rare du virus qui n’a pas pu être décelé dans les épidémies précédentes. « La paralysie flasque aiguë est un symptôme devenu de plus en plus rare, depuis que les efforts mondiaux pour éradiquer la polio ont été effectués. Ces 12 nouveaux cas soulèvent la possibilité que l’entérovirus D68 puisse être comme d’autres virus, lié à des flambées de PFA chez les enfants dans des régions où le poliovirus ne circule plus, comme l’Amérique du Nord, l’Asie ou l’Europe », précise le Dr Kevin Messacar, médecin et chercheur en maladies infectieuses pédiatriques, l’un des auteurs principal de l’étude.
« Bien que nos résultats ne prouvent pas que l’entérovirus D68 soit la cause des présentations neurologiques décrites, plusieurs facteurs épidémiologiques, virologiques et cliniques suggèrent un lien entre le virus EV-D68 et la maladie neurologique », expliquent les auteurs. Depuis la déclaration de ces 12 cas, 107 cas similaires de paralysies ont été rapportés dans 33 Etats des États-Unis et un en France entre le 1er août et le 10 décembre 2014. « Si une enquête plus approfondie confirme le lien entre EV-D68, PFA et dysfonctionnement des nerfs crâniens, l’entérovirus EV-D68 sera ajouté à la liste des entérovirus non-polio susceptibles de provoquer de graves dommages neurologiques, potentiellement irréversibles », concluent les auteurs.
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