Dans une note présentée en juin dernier, l’OMS avertit que les changements climatiques représentent de graves risques pour la santé mentale, exhorte les pays à inclure l’aide en santé mentale parmi les mesures à adopter face à la crise climatique. Mais si les publications abondent autour des conséquences du réchauffement climatique sur la santé physique et font consensus, leur impact sur la psyché reste largement ignoré du champ de la recherche. Et la communauté psychiatrique est elle-même partagée à leur sujet.
L’écoanxiété fait débat, elle n’est ni un syndrome, ni un diagnostic psychiatrique officiel, elle ne figure pas dans le DSM-5, l’American Psychological Association la définissant comme la peur chronique d’une catastrophe environnementale, qu’il conviendrait de ne pas « pathologiser ».
Pourtant, les cliniciens, à l’instar du Pr Antoine Pelissolo (CHU Henri-Mondor) décrivent des tableaux anxieux chez les patients concernés, des attaques de panique, des crises d’angoisse, des troubles du sommeil, des pensées obsessionnelles, des troubles alimentaires (anorexie, hyperphagie), des émotions négatives (peur, tristesse, impuissance, désespoir, frustration, colère, paralysie), jusqu’à des angoisses de survie. Une polarité dépressive serait aussi diagnostiquée, à partir du constat de deuil écologique, propagé par les canicules et les catastrophes climatiques.
Répercussions psychiatriques en cascade
« Les catastrophes climatiques engendrent bien des psychotraumatismes dans les populations, confirme le Dr Guillaume Fond, enseignant-chercheur au CERESS (Centre d’étude et de recherche sur les services de santé et la qualité de la vie, faculté de la Timone), auteur de plusieurs publications, elles provoquent des troubles du sommeil et des troubles anxiodépressifs, avec des répercussions en cascades qui affectent d’abord les personnes les plus vulnérables, les personnes âgées, isolées, les patients chroniques, et aussi beaucoup de jeunes. »
Sur 10 000 adolescents et jeunes adultes (16-25 ans) interrogés dans dix pays pour une étude publiée dans « The Lancet Planetary Health » (septembre 2021), 84 % se déclaraient inquiets face au réchauffement et jusqu’à 59 % se disaient très inquiets.
« Le phénomène peut paraître sain, comme une réaction légitime face à un risque objectif, analyse le Dr Fond. Mais attention de ne pas céder au déni et à la politique de l’autruche en présence de troubles de plus en plus fréquents qui interagissent avec d’autres stress, peuvent entraîner des phénomènes de freezing, de burn-out, d’agressivités sous diverses formes. L’écoanxiété peut être considérée comme un marqueur sain, elle n’en nécessite pas moins une prise en charge adaptée, pas forcément médicalisée, avec des régimes alimentaires, de la méditation de pleine conscience, une meilleure écoute, un accompagnement dans les nouveaux choix de vie, etc.. »
Couper le robinet de l’information toxique
Des facteurs déclenchants doivent aussi être pris en compte : « Il faut savoir couper le robinet de l’information toxique, avertit le Dr Fond. Lorsqu’elle tourne en boucle, même avec des données pertinentes comme les rapports d’experts, il y a un risque que le sentiment de détresse finisse par submerger une légitime prise de conscience. »
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