Devant la recrudescence des cas de rougeole, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) publie, à la demande de la Direction générale de santé (DGS), de nouvelles recommandations sur la stratégie de surveillance et de confirmation biologique des cas en situation épidémique.
Le HCSP rappelle le bilan de la rougeole : plus de 1 700 cas ont été diagnostiqués entre le 6 novembre 2017 et le 18 avril 2018 (données provisoires), l'ascension rapide sur les premières semaines de 2018 « faisant craindre une nouvelle épidémie d’ampleur importante, comme cela a été observé en France entre 2008 et 2012 ».
Une analyse du statut vaccinal des cas de rougeole survenant chez les personnes ciblées par la vaccination (nées après 1980), montre que la majorité des cas surviennent chez des personnes non ou insuffisamment vaccinées (87 % des cas, dont 74 % non vaccinées et 13 % vaccinées avec une seule dose). La rougeole a entraîné entre 2008 et 2018 plus de 1 500 pneumopathies sévères, 35 encéphalites/myélites et 21 décès parmi les 25 000 cas.
Bien que plus de la moitié des cas aient été déclarés en région Nouvelle Aquitaine, « aucun département aujourd’hui indemne de rougeole n’est à l’abri d’une extension de la circulation virale dans un avenir proche, car la couverture vaccinale rougeole (CV) requise pour interrompre la circulation du virus (de 95 % à 2 ans pour les 2 doses de vaccin) n’est actuellement atteinte nulle part sur le territoire national », insiste le Haut Conseil.
Couverture insuffisante chez les médecins
Le Haut Conseil pointe également l'insuffisance de la couverture vaccinale des professionnels de santé qui selon des études, certes anciennes (2009) était évaluée à 46 % chez les médecins, 70 % chez les sages-femmes et 56 % chez les infirmières, « situation qui facilite la survenue de foyers nosocomiaux dans les établissements de soins », insiste le HCSP.
Parmi ces nouvelles recommandations, le HCSP enjoint les établissements de santé et médico-sociaux à prendre toutes les mesures nécessaires pour vérifier et mettre à jour dans les meilleurs délais le statut vaccinal des professionnels de santé vis-à-vis de la rougeole selon les recommandations en vigueur.
Le Haut Conseil suggère une évolution des textes en vigueur concernant la vaccination des professionnels au contact de populations vulnérables (en particulier les personnels de santé), notamment l'introduction d'une obligation temporaire en cas d’épidémie ou de situations laissant craindre une épidémie. De même, le législateur devrait prévoir l’éviction de personnes contacts n’ayant pas fait la preuve de leur immunisation, en particulier dans les collectivités de jeunes enfants et en milieu scolaire.
Déclaration obligatoire, essentielle
Par ailleurs, le HCSP précise qu'il est « primordial de maintenir la surveillance par le signalement et le remplissage de la fiche de déclaration obligatoire (DO) des cas afin de suivre la dynamique de l’épidémie et d’assurer la gestion autour des cas », précise le HCSP. Même dans les régions en situation épidémique, une investigation a minima autour de chaque cas reste nécessaire pour identifier les personnes ou les situations prioritaires notamment les personnes à risque de forme grave (nourrissons de moins d’un an, femmes enceintes, personnes immunodéprimées). Même chose pour les collectivités à risque de formes graves (crèches pouvant accueillir des enfants âgés de moins d’un an, services hospitaliers), les communautés en situation de précarité (communautés de gens du voyage, personnes déplacées migrantes ou réfugiées). Le risque d’exportation vers des zones en situation d’élimination de la rougeole (départements français des Amériques, région des Amériques) doit être repéré.
Promouvoir la confirmation biologique
Quant à la confirmation biologique, s'il n’est pas toujours possible de l'obtenir, « celle-ci doit continuer à être promue quelle que soit la situation épidémiologique dans une région », insiste le Haut Conseil. Le diagnostic biologique est à réaliser en priorité en présence de facteurs de gravité : personne hospitalisée ; cas suspect de rougeole chez une personne à risque de rougeole grave (nourrisson âgé de moins de 12 mois, personne immunodéprimée, femme enceinte) ; cas suspect de rougeole dans l’entourage familial de personnes non immunisées à risque de rougeole grave (nourrisson âgé de moins de 12 mois, femme enceinte, personne immunodéprimée).
En l’absence de facteurs de gravité, la confirmation biologique est recommandée dans certaines situations en particulier lors d'une suspicion de rougeole chez une personne résidant dans un des trois départements français d’Amérique (région OMS des Amériques où la rougeole est éliminée).
Dans le contexte d’épidémie, l’utilisation des kits salivaires, disponibles auprès des ARS, doit être réservée en priorité aux nourrissons et aux patients dont l’accès à un laboratoire de biologie médicale spécialisé est difficile du fait de l'éloignement (envoi des kits salivaires à température ambiante, pour la recherche du virus par biologie moléculaire).
Enfin, le HCSP recommande une stratégie de communication forte et réactive auprès des professionnels et de la population générale.
Une définition des niveaux épidémiques
Le HCSP propose une définition des niveaux épidémiques. Au niveau d’une région, une épidémie est définie par la « présence de chaînes de transmission
actives avec une tendance à l’augmentation hebdomadaire du nombre de cas ». En fonction de l’extension géographique, deux niveaux peuvent être distingués : épidémie niveau 1 lorsqu'une faible partie des départements est en situation épidémique ; épidémie niveau 2 lorsque la grande majorité ou la totalité des départements est en situation épidémique. La même logique s’applique au niveau national.
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation