Au centre pénitentiaire de Fresnes (Val-de-Marne), le service médico-psychologique régional (SMPR) du groupe hospitalier Paul-Guiraud (Villejuif) a mis en place une structure unique en France pour accompagner les auteurs d’infractions sexuelles dans le cadre d’un programme thérapeutique de six mois organisé en hôpital de jour.
Avec près de 8 000 individus, les auteurs de violences sexuelles représentent la deuxième population de condamnés dans les prisons françaises. Parmi les 22 établissements pénitentiaires les accueillant, certains mettent peu à peu en place des équipes spécialisées qui peuvent proposer des thérapies de groupe ou des thérapies individuelles.
À la maison d’arrêt de Fresnes, le service médico-psychologique régional (SMPR) du groupe hospitalier Paul-Guiraud a créé en septembre 2007 un hôpital de jour pour les auteurs d’infractions sexuelles (HDJ). Implantée dans un étage dédié au sein de l’unité psychiatrique d’hospitalisation (UPH) de l’établissement, cette structure de soins unique en France accueille 12 personnes – détenues ou prévenues – consentantes pour une session thérapeutique de six mois. Ce programme combine thérapies de groupe, évaluations médico-légales, bilans psychométriques et prise en charge individuelle incluant éventuellement une chimiothérapie spécifique.
Repérer des « trucs »
« Travailler en hôpital de jour est très important car il va y avoir une responsabilité soignante pour ces 12 personnes du lundi au vendredi, de 9 h à 18 heures », souligne le Dr Magali Bodon-Bruzel, psychiatre et chef du pôle « soins aux personnes placées sous main de justice » du groupe hospitalier Paul-Guiraud. Pendant 6 mois, les 12 détenus évoluent dans deux groupes fermés de 6 personnes. « Notre projet, c’est de leur apporter une forte mobilisation psychique, avec une sorte de bagage de soins de compréhension d’eux-mêmes », explique le psychiatre. « Le but est que l’acte de l’infracteur prenne du sens dans son histoire et qu’il arrive à repérer des "trucs" pour ne pas recommencer », ajoute-t-elle. Pour constituer les groupes de détenus, les volontaires sont tous rencontrés individuellement par les infirmières qui évaluent les profils. « Il y a un groupe de prévenus et un groupe de condamnés car on s’est aperçu que la situation judiciaire et pénale prévalait par rapport aux dispositions de la personnalité », note le Dr Bodon-Bruzel.
Chaque semaine pendant les six mois du programme, les groupes travaillent autour de trois leviers principaux. Des sessions s’inspirant des thérapies cognitivo-comportementales développées au Québec permettent de travailler sur les « habilités sociales », les « territoires et limites », la « responsabilité et culpabilité », la reconnaissance de la personne de la victime... D’autres sessions, davantage psychodynamiques, animées par un psychiatre psychanalyste s’orientent plutôt sur des thèmes comme la gestion des émotions, la reconnaissance de l’émotion et du besoin, la question de la honte et de la haine, les représentations sexuelles, les scenarii sexuels, le sadisme… Un troisième type de session coordonné par des infirmières formées en Belgique sur les échelles actuarielles, complète le dispositif. L’ensemble de ces sessions s’articulant de manière très verticale.
Une forte mobilisation psychique
Durant les thérapies de groupe, « on observe de petites décompensations du fait de la forte mobilisation psychique des participants. Un tel est anxieux à la fin d’une session, un autre s’est retenu de pleurer… L’infirmière ou le psychologue peut alors susciter la rencontre avec le détenu, laquelle peut aboutir sur un recadrage, avec éventuellement une prescription de traitement, y compris des traitements frénateurs de la libido », indique le Dr Bodon-Bruzel.
Au cours des quatre premières sessions thérapeutiques, un peu plus de 20 % d’entre eux a demandé ce type de prescription, précise-t-elle. Depuis la mise en place du HDJ pour délinquants sexuels, 91 personnes ont été prises en charge et seul un participant est sorti volontairement du programme. Un premier bilan montre qu’une majorité de patients déclare vouloir poursuivre les soins en individuel pendant la suite de leur détention. L’équipe du Dr Bodon-Bruzel travaille actuellement sur une évaluation du dispositif qui doit être présentée en mai prochain à Québec, à l’occasion du Congrès international francophone sur l’agression sexuelle (CIFAS).
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
Dès 60 ans, la perte de l’odorat est associée à une hausse de la mortalité
Troubles du neurodéveloppement : les outils diagnostiques à intégrer en pratique
Santé mentale des jeunes : du mieux pour le repérage mais de nouveaux facteurs de risque