LES TRANSPORTS ont un impact certain sur la santé respiratoire. Les polluants inhalés sont variés : issus de la combustion de différents gaz, comme le dioxyde d’azote (NO2), à un moindre degré de soufre (SO2), le monoxyde de carbone (CO), mais aussi les corps organiques volatiles libérés lors de la combustion incomplète de carburant ou encore présents dans l’habitacle des véhicules, et les particules fines, de moins de 10 µm. Les véhicules diesel tendent à produire des particules de tailles plus petites, voire ultrafines de l’ordre de 0,1 µm. L’urbanisme dense limite la rapidité de décroissance des niveaux de pollution. L’émission des moteurs de véhicules est la principale source de pollution en zone intraurbaine.
Des données incontestables montrent un lien entre le niveau d’exposition aux particules fines sur le long terme et le déclin de la fonction respiratoire. Le diesel représente un facteur déterminant de l’augmentation de prévalence et de morbidité des maladies allergiques en agissant non seulement sur les réponses allergiques préétablies mais aussi sur leur genèse.
On sait que la pratique de la course à pied chez l’asthmatique à Hyde Park ou à Oxford Street n’a pas les mêmes conséquences. Quatre-vingt-trois pour cent des particules urbaines sont issues du trafic et 87 % de celles-ci du diesel. À Oxford Street, les taux de NO2 et de particules fines et ultrafines sont beaucoup plus élevés qu’à Hyde Park, et cette exposition est responsable d’une chute de la fonction respiratoire lors de la course à pied, non retrouvée pour un même effort à Hyde Park. Courir en ville, bouger, oui ! Mais si possible à distance d’axes routiers fréquentés. Plusieurs travaux vont dans le même sens et montrent que vivre à une distance de moins de 150 m environ d’un axe routier fréquenté, surtout pour un enfant, est associé à une plus grande proportion de sensibilisation aux pneumallergènes, à une fréquence accrue d’asthme et à une perte de fonction respiratoire. Chez des étudiants, la proximité d’une route fréquentée, un transport de plus d’1 heure par jour, (par bus ou métro = taux plus élevé de NO2 ; p = 0,03) est associé à une diminution du rapport FEV/FVC et des débits aériens distaux (p ‹ 0,05)
La qualité de l’air inhalé à Paris à vélo a été évaluée par « AIRPARIF », à l’aide de capteurs de polluants portatifs. Des études similaires ont été effectuées à Amsterdam ou Copenhague. À trajet équivalent, l’air inhalé par le cycliste reste moins pollué que celui de l’automobiliste, y compris dans les zones fréquentées. La qualité de l’air s’améliore avec l’éloignement du trafic. Le cycliste inhale moins de monoxyde de carbone, de dioxyde d’azote, de benzène. Il peut choisir un espace sur la chaussée et utilise les pistes cyclables ou les couloirs de bus avec une diminution de 30 à 45 % de l’exposition aux polluants. Il peut prendre les petites rues, en cas d’encombrements, et donc s’éloigner des autres véhicules. Il peut éviter l’arrière des bus. Il ne prend pas les grands axes routiers et les tunnels, ou des taux extrêmes de polluants sont parfois présents. Même si la ventilation/minute est supérieure en moyenne (X2 environ), à celle de l’automobiliste, les trajets sont en général plus courts et les taux de polluants inhalés moindres.
L’automobiliste est le plus exposé.
Dans sa voiture, l’automobiliste est soumis à la pollution de l’air issu de sa prise d’air, parfois placée au niveau du pot d’échappement de la voiture qui précède. L’air intérieur est lent à se renouveler. Il est soumis et contraint aux embouteillages. Enfin, des données récentes montrent que l’habitacle, neuf, ou même d’occasion, fait de matières plastiques, cuirs traités, laques, colles, etc. libère des composés organiques volatiles (COV) en grand nombre et avec un seuil de toxicité souvent atteint. Ces données proviennent de nos voisins allemands qui ont conduit ces analyses. L’impact sur la santé respiratoire de l’inhalation de ces COV à des taux allant jusqu’à 15 000 µg/m3 lorsque le seuil de toxicité est fixé à 100, reste à déterminer, notamment chez l’enfant qui passe parfois plusieurs heures en voiture.
Enfin, le piéton est 2 à 5 fois moins exposé que l’automobiliste. La marche reste la solution qui préserve au mieux nos poumons.
Se mouvoir à pied et à vélo reste la meilleure option pour la santé : bouger, à moindre inhalation de polluants pour un même trajet… Ces données sont un plaidoyer pour accentuer les politiques en faveur de la réduction des émissions de polluants, et pas uniquement du monoxyde de carbone.
* CHRU de Lille
McCreanor J, et coll. New Engl J Med; N Engl J Med 2007;357(23):2348-58.
Zuurbier M, et coll. Epidemiology 2011;22(2):219-27.
Pénard-Moran C, et coll. Eur Resp J 2010;36(1):33-40.
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