Accusée de violence envers une patiente, une généraliste gagne son bras de fer judiciaire

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Publié le 30/01/2016
Code pénal

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Crédit photo : Phanie

Le cauchemar du Dr D. prend fin. Le 22 janvier dernier, cette généraliste installée à Nancy a été disculpée par la cour d’appel dans une affaire qui l’opposait à l’une de ses patientes, après plus de deux ans de démêlés judiciaires et une garde à vue de près de 10 heures.

Très médiatisée par la presse locale, l’affaire remonte au mois d’octobre 2013. Le Dr D. reçoit une patiente, Mme X., qui souhaite récupérer son dossier médical après une première visite, la veille. Le médecin refuse : la demande doit suivre une procédure stricte.

Le ton monte, la patiente ne veut pas quitter le cabinet. Le Dr D. se sent agressée, elle sort une arme de défense (tirant des projectiles en caoutchouc) et la pose sur son bureau.

Mme X. finit par quitter les lieux, « comme une furie » dira une patiente présente dans la salle d’attente. Dans la foulée, une détonation se fait entendre. Le Dr D. vient de tirer dans le plafond, n’ayant pas trouvé d’autre moyen, dans l’affolement, pour libérer le chien de son arme. C’est ce qu’elle expliquera plus tard aux enquêteurs.

Le tribunal de grande instance de Nancy a donné raison au praticien dans un jugement rendu en juin 2014. La justice a reconnu qu’il s’agissait d’un cas de légitime défense et que le fait de montrer une arme dans le contexte décrit constituait « une réponse proportionnée ». La cour d’appel a confirmé ce jugement il y a quelques jours.

« J’ai connu la honte de la garde à vue »

« Je suis soulagée, confie avec émotion le Dr D. au “Quotidien”. L’arrêt de la cour d’appel me réhabilite. Je sors d’une période de cataclysme personnel et financier. » Le médecin a été très éprouvé par cet épisode. « J’ai été montrée du doigt par toute la ville, présentée comme celle qui tire sur ses patients, raconte la généraliste. J’ai connu la honte de la garde à vue, mon compagnon a aussi subi cette situation. J’ai dû m’arrêter des semaines pour gérer toute cette affaire, je suis tombée malade par anxiété… »

À l’époque des faits, elle exerçait dans un quartier réputé difficile de Nancy, gangréné par le trafic de drogue. « C’est un climat de violence permanent qui est intenable. J’y ai subi des agressions quotidiennes. C’est la loi du “Tu fais ce que je te dis ou je te cogne”. »

C’est dans ce contexte qu’elle avait pris la décision de détenir en toute légalité une arme de défense dans son cabinet, puis de quitter le quartier sous les menaces, pour s’installer dans une autre zone de Nancy.

« Aujourd’hui, je commence juste à me remettre, à vivre normalement, à dormir de nouveau », explique le médecin malgré tout angoissé par sa situation financière en raison de son inactivité pendant plusieurs mois.

Le Dr D. ne peut pas encore définitivement tourner la page. Le 10 février prochain, elle sera entendue par la chambre disciplinaire de l’Ordre, toujours dans le cadre de cette affaire.

En 2015, le conseil régional l’avait condamnée à un mois de suspension d’exercice. Elle avait fait appel de cette décision. Aujourd’hui, elle espère bien que l’arrêt de la cour d’appel, en sa faveur, amènera l’Ordre à revoir son jugement.


Source : lequotidiendumedecin.fr