Je juge, disait Machiavel, que si la fortune est l’arbitre de la moitié de nos actions, elle nous en laisse gouverner l’autre moitié, ou à peu près…
Donnant largement raison au susnommé, nous sommes forcés de reconnaître que l’adversité a été, avec les médecins hostiles au projet Touraine, d’une malice sans pareille !
Par deux fois, une actualité douloureuse déstabilisait au dernier moment leurs actions fomentées depuis des mois avec autant de rigueur que de pertinence.
Début janvier 2015, Charlie Hebdo.
Dernier événement en date, le 16 novembre 2015 au matin devant le palais Bourbon, armés d’une inébranlable conviction, dix mille praticiens et professionnels de santé, s’apprêtaient à entrer en action. En un tournemain et de façon magistrale, ils auraient fait, en même temps qu’irruption dans l’illustre bâtiment, plier la ministre et disparaître une bonne fois pour toutes sa loi.
Il y a eu le vendredi 13 et il en a été autrement.
D’aucuns ont pu se demander alors si MST n’avait pas dans une botte secrète les pouvoirs maléfiques d’une sorcière ; certains l’ont même imaginée, boule de cristal et marc de café à portée de la main, foulard de Madame Irma sur la tête, dans un rituel Vaudou, planter les aiguilles de la destruction sur l’effigie du grand corps souffrant de la confrérie des médecins libéraux dont elle avait juré la perte.
Avaient-ils raison de confondre notre ministre avec une diseuse de mauvaise aventure ? Depuis, dans de nombreux cabinets médicaux, on s’interroge encore !
Ce qui est certain, c’est que le sort a bel et bien accepté que de sinistres assassins « s’associent » sans le savoir à cette volonté gouvernementale, dans ce tohu-bohu d’événements qui s’entrechoquent pêle-mêle et font que l’impondérable en arrive parfois à perturber la trajectoire du prévisible.
Lors de ce dramatique 13 novembre, les confrères présents dans la capitale se sont portés immédiatement au secours des victimes. Dans les lendemains de la tragédie, encore traumatisés comme tout un chacun par la dureté des événements, les médecins grévistes ont vu naître en eux le sentiment du dépit et de la déception. Manifestants d’hier, ils ont été contraints de faire contre mauvaise fortune bon cœur et d’accepter de rester coi, l’état d’urgences ayant été imposé en la circonstance par nos valeureux politiciens. On peut comprendre en partie leur décision.
Mais là où ceux-ci pouvaient « faire différent » est dans ce qui suit. Avec un mépris palpable et infiniment peu d’élégance, ce gouvernement a fait passer sa loi dans la plus grande indifférence générale, cette loi dont le « socle »** n’était, rappelons-le une fois encore, ni indispensable, ni nécessaire, ni même utile, cette loi dont aucune urgence, bien évidemment, compte tenu de l’actualité, n’imposait un repassage immédiat dans l’auguste assemblée.
Entre le fatidique 13 novembre et le 27 du même mois, toute idée d’un moratoire, pourtant clairement réclamée, d’une main discrète mais ferme, a été récusée.
Le 28 novembre, ils ont eu l’indécence de finir d’enfoncer cet abject clou qu’ils avaient si lamentablement planté. L’affaire était close.
On aurait pu croire alors nos revendications éteintes pour des lustres et notre « ministre », enfin satisfaite d’avoir pu triompher sans peine et, cela va de soi, dans le même temps piteusement sans gloire.
C’était oublier l’extraordinaire ressort qui en chacun être humain se tend lorsqu’une injustice s’est outrageusement installée.
C’était sans tenir compte de la théorie machiavélienne qui rappelle que si l’adversité a des « pouvoirs », l’imagination humaine, elle, n’a pas de limite et rebondit sans cesse.
C’était sans compter sur l’opiniâtreté de toute une profession, dans l’épreuve enfin soudée.
Il aura donc une suite. Des surprises certainement et de multiples rebondissements encore…
Car il faudra bien admettre une bonne fois pour toutes que si l’on peut imposer à une troupe d’acteurs de jouer une pièce contre leurs volontés, ceux-ci auront toujours la possibilité ou de la jouer très mal ou de finir par ne plus la jouer du tout.
** le TPG
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