Nouveau revers pour un couple de femmes qui s'est vu refuser l'accès à l'assistance médicale à la procréation (AMP) par le CHU de Toulouse en 2014.
Après le rejet de leur requête pour discrimination par la Cour européenne des droits de l'Homme, au motif qu'il était du ressort de la juridiction française de se prononcer sur leur situation, c'est le Conseil d'État qui refuse de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité qu'elles lui avaient soumise début juillet, au Conseil constitutionnel.
Les deux femmes mariées, chez lesquelles les problèmes d'infertilité ont été médicalement diagnostiqués, considèrent que la loi actuelle - qui réserve l'accès à l'AMP à un couple hétérosexuel, dont les deux membres sont vivants et en âge de procréer, et qui souffre d'une infertilité médicalement diagnostiquée - va à l'encontre du principe d'égalité devant la loi, garanti par les articles 1 et 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
Motif : « elle introduit une différence de traitement entre les couples souffrant d'une infertilité médicalement diagnostiquée, selon qu'ils sont de même sexe, ou de sexe différent », lit-on dans la décision du Conseil d'État. À noter, le couple dénonçait déjà devant le CEDH une discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.
Une différence « pas contraire au principe d'égalité »
Or le Conseil d'État estime que le « principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général ». La Haute juridiction juge aussi que les couples hétérosexuels et homosexuels sont, au regard de la procréation, dans des situations différentes. Elle en conclut que la différence de traitement entre les couples hétéros et homosexuels, dénoncée par les deux femmes, « n'est pas contraire au principe d'égalité ». Et estime qu'il n'y a donc pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la QPC.
« C'est une décision invraisemblable », a réagi auprès de l'AFP Caroline Mécary, l'avocate du couple. « En refusant de transmettre cette QPC au Conseil constitutionnel, le Conseil d'État a outrepassé ses pouvoirs et s'est érigé en censeur », a-t-elle estimé.
Dans son rapport rendu en juillet sur la révision des lois de bioéthique, le Conseil d'État estimait que le droit ne commandait ni le statu quo, ni l'évolution des conditions d'accès à l'AMP, renvoyant la question à une décision politique. Il suggérait néanmoins, en cas d'ouverture de l'AMP à toutes les femmes, la création d'un régime ad hoc de filiation pour les femmes, via une déclaration commune anticipée, et une prise en charge intégrale par l'assurance-maladie de toutes les AMP. Le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) vient de réaffirmer dans son avis 129 son soutien à l'extension de l'AMP aux couples de femmes et aux femmes seules, proposition qui doit être débattue dans le cadre du projet de loi de bioéthique, fin 2019.
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