Si « Le Généraliste » était paru en juin 1911

Comment vivre jusqu’à 1 000 ans…

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Publié le 08/09/2016
Histoire

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De toute éternité, le médecin s’est préoccupé de prolonger la vie de ses clients, soit par des procédés empiriques, soit à l’aide de méthodes scientifiques, soit encore par d’autres moyens plus ou moins rationnels. Il y a cent ans environ, le « Journal de Paris » publiait dans son numéro du 29 août 1810, un article qui commençait par une plaisanterie et qui finissait par une réclame. Nous avons cru intéressant de le transcrire d’autant que, si le problème de la longévité est encore à résoudre, nous aurions mauvaise grâce à méconnaître les services qu’a su rendre à la santé humaine l’hygiène bien comprise et consciencieusement pratiquée…

Voici cet article :
Un médecin publia, il y a quelques années, un ouvrage sur « L’art de procréer les sexes à volonté ». Un charlatan publia, quelque temps après un autre ouvrage sur « L’art de faire des hommes d’esprit » et un mauvais plaisant remarqua à cette occasion que le père de notre charlatan n’avait sûrement pas connu cet art-là.

Nous avons vu depuis un docteur allemand professer la science rare et sublime de distinguer, aux bosses de la tête, les braves et les poltrons, les femmes chastes ou infidèles, etc.

Huffeland, autre docteur allemand, moins fameux mais plus célèbre que celui dont nous parlons, a fait un gros livre sur « L’art de prolonger la vie ». Cet art, selon lui, consiste dans la sobriété, la tempérance, la modération et dans l’absence de toute espèce de crainte et, principalement, celle de la mort. Voilà au moins un but utile. Voilà des vertus bien recommandées en ce qu’elles sont fondées sur notre intérêt le plus cher, sur le besoin de prolonger nos jours. Encore Huffeland a-t-il eu le bon esprit de ne pas rendre chimérique l’espoir qu’il donne à ses lecteurs en ne portant qu’à 140 ans le terme éventuel qu’il fixe à la durée de la vie.

Mais voici un nouveau docteur (que je crois bien Français puisqu’il s’obstine à garder l’anonymat), bien plus savant que Huffeland et non moins hardi que Cagliostro qui, dans un petit livret intitulé « Réflexions sur l’état du genre humain », prétend bien rendre aux hommes leur taille primitive de 40 pieds de haut et la durée de la vie patriarcale de 1 000 à 1 200 ans. Il ne s’agit pour cela que de deux bagatelles : la première, de ne boire ni vin, ni aucune liqueur fermentée ; et de ne manger ni beurre, ni fromage, ni sel, ni pain, ni épices, etc. ; la seconde, de n’avoir ni chagrins ni maladies. « C’est alors, dit notre consolant docteur, que nous rentrerons dans l’ordre primordial d’une vie commune de 1 000 ans sans autre infirmité physique que la caducité. »

Certes, une telle découverte mérite autant d’éloges que celle de la « Mégaloanthropogénésie » et doit être recommandée à l’attention du jury décennal (créé par décret impérial pour l’attribution de récompenses au meilleur livret, aux inventions les plus utiles, etc.). 

(« La Chronique médicale », juin 1911)


Source : lequotidiendumedecin.fr