« First Man », « Capharnaum », « The House that Jack built »

De la Lune à la Terre

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Publié le 18/10/2018
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Cinéma1-First Man

Cinéma1-First Man
Crédit photo : UNIVERSAL

Cinéma2-Capharnaum

Cinéma2-Capharnaum
Crédit photo : MOOZ FILMS

Le 21 juillet 1969, un Américain nommé Neil Armstrong était le premier homme à mettre le pied sur la Lune. Un exploit préparé par huit ans d'entraînement extrêmement dur que, dans « First Man » Damien Chazelle, changeant résolument de genre après « La La Land » (2016), veut raconter comme un thriller. Même si on connaît la fin et les principales péripéties, le suspense baigne chaque étape.

Et ça secoue ! Dès les premières images. S'intéressant moins à la technologie (reconstitution précise, avec l'aide de la NASA) qu'aux expériences inimaginables que vivent les astronautes, le cinéaste installe directement le spectateur dans le cockpit.

Au départ, la biographie signée par l'historien James R. Hansen (Robert Laffont), qui a pu rencontrer l'astronaute (décédé en août 2012). « First Man » est avant tout l'histoire d'un homme, certes pas ordinaire, dont on est conduit à partager aussi les joies et les chagrins intimes et, un peu, la vie quotidienne. « Cette histoire devait se dérouler entre la lune et la cuisine », dit Chazelle.

À l'exception d'une ou deux scènes un peu larmoyantes dont on aurait pu se passer, le film durant 2 h 20, le temps passe vite en compagnie de Ryan Gosling, Claire Foy (Janet Armstrong) et toute une équipe d'acteurs aussi efficaces que les spécialistes de l'agence spatiale américaine. Mais après l'exploit, quoi ? Le film ne répond pas.

La souffrance des enfants

Retour sur Terre avec « Capharnaüm », le troisième long métrage de la Libanaise Nadine Labaki (« Caramel », « Et maintenant on va où ? »), récompensé à Cannes par le prix du jury. Centré sur l'enfance maltraitée, le film veut embrasser également le sort des immigrés clandestins, le racisme, la situation de la femme, la pauvreté… (d'où le titre, qui décrit aussi la situation de certains quartiers de Beyrouth et d'un pays qui a accueilli plus d'un million de réfugiés syriens). La cinéaste croit au pouvoir du cinéma et veut s'en servir comme d'une arme.

Zain, le héros de 12 ans, intente un procès à ses parents pour l'avoir fait naître. Des flash-back, entre les courtes scènes de tribunal, expliquent l'enchaînement des faits. La pauvreté, le manque d'amour, la sœur de 11 ans « vendue » pour un mariage forcé… Zain fuit et va se retrouver seul à tenter de survivre avec un jeune enfant qui marche à peine. Difficile de ne pas être touché. Les acteurs sont des non-professionnels, recrutés dans un casting sauvage. Zain Al Rafeea, réfugié syrien de 13 ans, est étonnant, comme la petite Yordanos Shiferaw, née en Érythrée (à 2 ans peut-on parler d'actrice ?).

La folie von Trier

C'est dans un autre univers, celui de l'imaginaire torturé de Lars von Trier, que se joue « The House that Jack Built », présenté hors compétition à Cannes, sept ans après des propos choquants sur Hitler tenus par le cinéaste danois, et dont certaines scènes ont fait fuir les spectateurs de la soirée de gala.

Toujours aussi fou ou aussi créatif, dans son cas c'est la même chose, Lars von Trier imagine une sorte d'artiste du crime en série, Jack (Matt Dillon, qui arrive à jouer de toutes sortes de nuances dramatiques et ironiques). On a droit à quelques-unes de ses œuvres sanglantes, très sanglantes, ponctuées de commentaires et de références artistiques et historiques (y compris de la période nazie), dans la conversation du héros avec un certain Verge (Bruno Ganz). Que peut-on montrer, que peut-on dire, quelles sont les limites ? Dans son film que l'on peut juger aussi talentueux qu'insupportable, Lars von Trier répond ainsi à sa manière provocatrice à tous ses détracteurs. Courageux ou inconscient, en tout cas maître des images.

Sinon, dans un tout autre genre, « le Flic de Belleville », comédie policière de Rachid Bouchareb inspirée du « Flic de Beverly Hills », avec bien sûr Omar Sy ; « le Jeu », de Fred Cavayé, une soirée débridée avec Bérénice Bejo, Stéphane De Groodt, Vincent Elbaz, entre autres ; le dessin animé « Yéti & Compagnie », attendu avec impatience par les enfants ; et le monstre de service, « The Predator », ressorti des années 1980 par Shane Black.

Et même si on a le temps, puisque l'exposition dure jusqu'au 27 janvier, on se précipite à la Cinémathèque pour « Il était une fois Sergio Leone » (www.cinematheque.fr).

 

Renée Carton

Source : Le Quotidien du médecin: 9695