Trois généralistes recrutés en quelques semaines, suivis d'un quatrième ! À l'heure où la désertification médicale gagne du terain, beaucoup de petites communes aimeraient avoir la même attractivité que Coutras en Gironde.
Pourtant, ce bourg de 8 500 habitants revient de loin. Après le départ en retraite de plusieurs généralistes, il se retrouve en 2015 avec 4 000 habitants sans médecin traitant ! La mairie rachète des locaux en centre-ville pour installer de nouveaux médecins mais le recrutement peine. C’est alors que l’agence régionale de santé (ARS) et le centre hospitalier voisin de Libourne entrent dans le projet.
Une association réunissant élus communaux, départementaux et responsables de l’hôpital est créée pour gérer le futur centre de santé hospitalo-communal, ouvert en septembre 2017, une première en France. « La mairie a apporté les locaux avec un loyer très modéré, l’ARS une aide au démarrage de 80 000 euros, le centre hospitalier et l’ARS se chargent du recrutement », explique Hassanat Marchand, directrice adjointe de l’hôpital de Libourne et présidente de l’association qui encaisse les actes et rémunère les médecins à hauteur de 4 000 euros net par mois pour un service de 35 heures. Au-delà, une rémunération à l'acte est prévue permettant aux médecins qui voudraient travailler davantage de compléter leurs revenus. L’association finance aussi une secrétaire à plein temps et un prestataire extérieur pour les prises de rendez-vous.
Un exercice qui correspond aux aspirations
Peu avant l’ouverture du centre de santé en septembre 2017, un quatrième médecin (à temps partiel) se joint donc au projet. Ces quatre généralistes, tous trentenaires, adhèrent pleinement à ce modèle hybride. « Je cherchais depuis longtemps un poste qui allie salariat et médecine générale de terrain, explique le Dr Tiana Guilhem-Ducleon. Ici, nous sommes tous jeunes mamans, jeunes papas ou désirant le devenir, et cet exercice nous correspond : 35 heures, 5 semaines de congés payés, des RTT, pas de comptabilité ni de gestion des stocks ou des locaux, et un salaire proche de celui d’un libéral. »
Ces quatre généralistes ont mis quelques mois à constituer leur patientèle mais après quinze mois de fonctionnement et 12 000 actes réalisés (visites et consultations), le centre de santé semble sur la bonne voie, même s’il n’a pas encore atteint l’équilibre (attendu fin 2019). « Tout le monde est conscient de notre fragilité car nous sommes sur un territoire rural où les visites à domicile sont très chronophages », indique Hassanat Marchand.
En effet, si le premier exercice comptable pointe une petite faiblesse de productivité, le Dr Guilhem-Ducleon se veut optimiste. « Nous atteindrons l’équilibre sans souci, car chacun développe très bien sa patientèle. »
Confort incomparable
Si la recette séduit les premiers praticiens concernés, qu’en pensent les médecins libéraux du secteur ? « Nous avons ressenti quelques réticences, admet le Dr Guilhem-Ducleon, mais aujourd'hui d’autres confrères nous envoient des patients dès qu’ils sont surchargés. »
Quoi qu’il en soit, d’autres départs en retraite de généralistes devraient conforter ces quatre médecins salariés dans un exercice qui les épanouit. « C’est l’avenir ! s'enthousiasme le Dr Tiana Guilhem-Ducleon. D’ici à 15 ans, je pense que la plupart des installations se feront comme ça, je ne vois pas l’intérêt du libéral. Ici, notre confort d’exercice est incomparable. »
Unique en son genre, le centre de santé hospitalo-communal de Coutras entend poursuivre son développement avec l’installation de dentistes, le démarrage de consultations avancées (tabacologie, diabétologie) et de la télémédecine. Sa démarche originale intéresse déjà plusieurs autres communes en proie à la désertification médicale.
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