En Italie aussi, le gouvernement veut en finir avec le numerus clausus, les médecins tiquent

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Publié le 14/11/2018

L’abolition du numerus clausus fait partie des casse-tête du gouvernement italien. Dans ce pays, l’accès aux études de médecine est conditionné par la réussite d’un examen d’entrée juste après le lycée. Le nombre de places ainsi que la répartition par université sont décidés chaque année au niveau national. Le contenu des examens est prévu par le ministère de l’Enseignement, de l’université et de la recherche, ainsi que la gestion des résultats et des attributions de places.

Mi-octobre, la présidence du Conseil a annoncé un peu vite la fin de ce « verrou » introduit en 1997 à l'entrée des études qui « favorise aujourd'hui les déserts médicaux », selon plusieurs dirigeants du Mouvement 5 étoiles (M5s), à commencer par la ministre de la Santé Giulia Grillo. Cette décision doit permettre « à tout le monde d’avoir accès aux études ».

Mais la communauté médicale italienne ne l’entend pas de cette oreille. « Ouvrir les vannes de la faculté à 60 000 ou 70 000 candidats est de la folie, nous n’avons pas de structures adéquates, cela veut dire revenir aux années 70, nous avons déjà 10 000 médecins qui peinent à trouver des débouchés, il faut financer les écoles de spécialisation, augmenter les bourses au lieu de céder à la logique de la dérive populiste », a répliqué le Dr Carlo Palermo, secrétaire de l’association Anaao-Assomed des médecins hospitaliers italiens. 

Catastrophe

« L’abolition du numerus clausus doit être accompagnée par une augmentation du nombre de bourses pour la spécialisation, sinon ce sera la catastrophe car les jeunes diplômés ne pourront pas participer aux concours publics inaccessibles sans spécialisation et ils devront chercher du travail à l’étranger. Attendons-nous à une nouvelle fuite des cerveaux », abonde Pierluigi Marini, président de l’association des chirurgiens hospitaliers.

Pour les associations étudiantes comme l’Union des universitaires (UDU), la décision gouvernementale « fait partie des slogans et s’inscrit dans la logique de campagne électorale permanente, sans investissements précis et ciblés. Les universités ne sont pas en mesure d’accueillir un surplus important d’étudiants ».

Préparer le terrain 

Face à cette levée de boucliers médicaux, le gouvernement transalpin a corrigé le tir. Dans un deuxième communiqué, la présidence du Conseil a affirmé qu’une erreur s’était glissée dans le premier texte et que « la fin du numerus clausus fait partie des objectifs politiques à moyen terme ». En attendant de remplacer le système actuel, probablement d’ici à fin 2019, plusieurs pistes ont été indiquées pour préparer le terrain dès la rentrée prochaine.

La principale concerne les critères actuels d’admission dans les études médicales, remis en cause par la ministre de la Santé. « La méritocratie n’est pas prise en compte, on ne prend pas les meilleurs mais uniquement ceux qui ont une bonne mémoire », explique la ministre de la Santé Giulia Grillo. Des propos qui font écho aux critiques entendues dans l'Hexagone autour d'un système de sélection encourageant le bachotage systématique...

De notre correspondante Ariel F. Dumont, à Rome

Source : lequotidiendumedecin.fr