Avant le référendum décidé par Tsipras

Grèce :  quel impact sur la France ?

Publié le 02/07/2015
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Tsipras et Juncker (président de la commission européenne)

Tsipras et Juncker (président de la commission européenne)
Crédit photo : AFP

De plus, un défaut dépend plus du créancier que de l’emprunteur. Il aurait suffi de différer la date du paiement de ce fameux 1,6 milliard d’euros que la Grèce devait payer le 30 juin pour éviter la faillite, au moins pendant quelques jours. Dans cette crise si douloureuse, il y a donc beaucoup d’aspects strictement formels. Il n’empêche que la Grèce est incapable de maintenir son train de vie, entièrement assuré par les subventions de l’Europe. Il fallait donc trouver des instruments pour mettre un terme à l’hémorragie, ce qui impliquait, pour les Grecs, des sacrifices supplémentaires. Si la négociation a échoué, c’est d’une part parce que le Premier ministre, Alexis Tsipras, a politisé l’affaire en présentant les prêteurs comme des ennemis du bien-être des Grecs, et, d’autre part, parce que le même Tsipras, qui vient de l’extrême-gauche, s’est montré incapable de lever l’impôt. La Grèce est en faillite parce que les commerçants ne reversent pas la TVA, parce que les propriétaires ne paient pas l’impôt foncier et la taxe d’habitation, parce que les armateurs sont protégés contre la fiscalité par la Constitution et parce que l’Église orthodoxe, riche à milliards, refuse de payer l’impôt sous le prétexte que l’on ne taxe pas le bon Dieu.

Les Français sont exposés à la dette grecque à hauteur de 1 000 euros par personne, soit un peu plus de 60 milliards au total. Mais cette somme est déjà incluse dans la dette publique, celel qui dépasse les 2 000 milliards et atteint 97 % du produit intérieur brut (PIB). À la suite de la première crise grecque en 2010, les banques française se sont désengagées de la dette grecque, sauf le Crédit agricole. Un « non » dimanche prochain au référendum ne devrait pas changer la vie quotidienne des Français.

Malheureusement, en économie, la psychologie est l’élement le plus important. Les marchés ont chuté un peu partout dans le monde alors que la Grèce ne représente qu’une infime partie du PIB de la zone euro et, a fortiori, de l’Union européenne. Tous les acteurs, gouvernement grec, peuple grec, Banque centrale européenne, Union européenne, Fonds monétaire international (FMI) sont dans un état de nervosité et d’agitation regrettable. Au fond, tout le monde joue le jeu de M. Tsipras qui consiste à dire : « Payez, où c’est vous qui serez ruinés ». C’est faux, bien sûr, et la faillite grecque, largement consommée avant d’être annoncée officiellement, ne porte atteinte qu’aux intérêts grecs. Mais nous continuons à réagir à cette crise comme si elle engendrait une catastrophe historique. Bien sûr, un « Grexit » prouverait que l’appartenance à l’euro n’est pas irréversible et démontrerait que la solidarité européenne ne fonctionne pas. Bien sûr, la zone euro sortirait humiliée et affaiblie d’une sortie de la Grèce. Mais la Grèce n’est pas la France, n’est pas l’Italie (contrairement à ce que croit M. Tsipras), elle n’est même pas le Portugal.

Il fallait s’y préparer.

Les Européens, François Hollande notamment, mais Angela Merkel aussi, ont littéralement couru après le gouvernement grec pour qu’il ne rompe pas la négociation. Encore aujourd’hui, ils veulent prendre langue avec les Grecs. Ils veulent prouver au monde qu’un État de l’Union et de la zone euro est invulnérable. Ils craignent l’assaut de la spéculation contre d’autres pays endettés (la France par exemple). Ils auraient dû préparer leurs opinions à un « Grexit ». Expliquer que nous ne pouvions pas continuer à assurer aux Grecs un niveau de vie artificiel qui ne correspond pas à leur production. Que la Grèce est entrée par effraction dans les institutions européennes et que son départ ne serait vraiment grave que pour elle-même. Cette attitude a fait de nous les méchants de l’histoire, des méchants qui ont déjà perdu 300 milliards et sont bien mal récompensés pour leur générosité.

RICHARD LISCIA

Source : Le Quotidien du Médecin: 9425