DE NOTRE CORRESPONDANTE
« Le risque sectaire a investi le domaine de la santé, c’est un phénomène absolument central dont il faut prendre la mesure », assure en préambule Françoise Chalumeau, représentante de la MIVILUDES (Mission interministérielle de vigilances et de lutte contre les dérives sectaires). La recherche de bien-être, de développement personnel, de différentes approches mentales est devenu lieu commun dans notre société. « Avant, la religion permettait de faire un compromis avec la société environnante, la secte se situe dans la rupture avec cette société qui prône le "chacun pour soi", explique Pierre le Coz, philosophe et vice-président du comité national d’éthique. Les sectes se situent du côté de la guérison, pas mécanique mais holistique. Ce que ne peut plus faire le médecin, qui est obligé de prendre les malades à la queue leu leu et ne leur consacrent pas assez de temps. » La médecine telle qu’elle est souvent pratiquée aujourd’hui laisse la porte ouverte à certains charlatans qui proposent une « écoute de son potentiel et la recherche de ses ressources inexploitées ». « Tous véhiculent des recettes qui tournent autour de la santé avec une approche curative ou préventive traitant de la purification ou du karma, confirme encore Françoise Chalumeau. Il est vrai que l’organisation des soins s’appuie aujourd’hui sur des bases essentiellement comptables qui donnent parfois une organisation trop rationnelle. Certaines méthodes apportent du positif et peuvent devenir complémentaires de la médecine traditionnelle et d’autres tomber dans un fonctionnement dévoyé et basculer dans la captation d‘adeptes. »
Un appoint ?
De nombreuses associations sont venues témoigner des conséquences douloureuses et parfois dramatiques de certaines pratiques. Certaines voix se sont élevées avec force quand Marcel Rufo, pédopsychiatre, a évoqué une « dérive possible sur des gens déjà fragiles et vulnérables ». Il a néanmoins avancé que « l’université doit faire une place aux médecines parallèles pour qu’on travaille ensemble. Loin de moi l’idée de la pensée magique mais les médiations corporelles ou la sophrologie, par exemple, peuvent être intégrées comme appoint à certaines médecines ».
Il importe donc aujourd’hui de savoir distinguer les « praticiens et acteurs du corps et de l'esprit » aux comportements éthiques et raisonnables de leurs confrères peu scrupuleux. Le GEMPPI a élaboré en 2008 la charte des « Praticiens et acteurs du corps et de l'esprit ». Le ministère a lancé aussi récemment un groupe d’appui technique pour examiner ces méthodes non conventionnées à visée thérapeutique. « Le but de cette mission est d’identifier ces pratiques et de les évaluer pour informer les professionnels et le grand public. Mais c’est un travail de longue haleine », a précisé Françoise Chalumeau.
Le GEMPPI a par ailleurs innové, suite à un premier bilan plutôt positif concernant sa charte. Il a crée en complément un centre répondant aux attentes des usagers dans les secteurs du mieux-être et du développement personnel, avec du yoga, de la médecine chinoise, etc. « Nous proposons la création de ce centre en réponse à ces questions, explique son président, Didier Pachoud. Avec une assurance sur l’éthique des personnes qui y officient et qui peuvent aider les gens à développer du mieux-être et du lien social. C’est un laboratoire social, en quelque sorte, dont il conviendra de mesurer les effets. »
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