Edito

Intouchables

Par
Publié le 23/03/2018
Edito

Edito

Le législateur est animé des meilleures intentions mais il lui arrive de voir trop grand. Malgré la loi de 2005 et en dépit des discours volontaristes, tous les établissements recevant du public ne seront pas accessibles fin 2018 aux personnes à mobilité réduite, et ils ne le seront pas avant longtemps. Les cabinets médicaux ne font pas exception. À qui la faute ? Aux praticiens qui rechignent à franchir le pas ? Au marché immobilier qui rend difficiles certains travaux ? Ou aux pouvoirs publics dont l’utopie l’a emporté sur le réalisme ?

Comme le montre notre dossier, les dérogations sont légion : impossibilité technique, contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural, disproportion du coût par rapport aux travaux ou opposition des copropriétaires à leur réalisation. Seules les structures nouvellement créées sont réellement tenues d’obéir aux normes. Et les médecins en fin de carrière ne se sont pas tous engagés dans un agenda d’accessibilité programmée, certains espérant prendre leur retraite avant l’application de la loi.

Depuis l’alternance, la nouvelle majorité, plus pragmatique, semble avoir revu les priorités. Si la loi prévoit d’adapter les cabinets pour accueillir les patients en fauteuil roulant ainsi que des exigences d’espace, d’éclairage, de repérage visuel et de signalisation pour les personnes sujettes à un handicap, visuel, auditif ou psychique, l’application devrait demeurer souple. Et heureusement : trop d’inflexibilité serait suceptible d’accélérer encore la désertification médicale, surtout dans les zones urbaines où les cabinets sont implantés dans des immeubles anciens. Leur mise en conformité serait coûteuse quand elle n’est pas impossible.

Les médecins, comme tous les autres acteurs qui remplissent des missions de service public, ont conscience de l’urgence de renforcer l’accessibilité de leur cabinet. Mais la France, très en retard par rapport aux nations scandinaves, ne s’est pas donné les moyens de réussir son pari. La loi a fixé la marche trop haute. L’objectif était tout bonnement... inaccessible.

Christophe Gattuso, directeur de la rédaction

Source : Le Généraliste: 2828