À TOUTES les tranches d'âge, la mortalité masculine est systématiquement supérieure à celle des femmes. Mais le degré de surmortalité des hommes varie selon des facteurs environnementaux, sociaux et économiques. Au cours du XXe siècle, alors que la mortalité s'abaissait régulièrement, les décès de cause infectieuse ont fait place à une mortalité en rapport avec des maladies dégénératives ou chroniques. La différence de mortalité entre les deux sexes s'est encore accentuée et la durée de vie moyenne des hommes a augmenté moins rapidement que celle des femmes au cours des cinquante dernières années. L'une des causes de la différence d'espérance de vie peut être en rapport avec la mortalité infantile.
De 1751 à nos jours.
Des gérontologues américains ont analysé les modifications de l'excès de mortalité infantile masculine entre 1751 et aujourd'hui en se centrant plus particulièrement sur le XXe siècle. Globalement, le taux de mortalité infantile a baissé de façon régulière en deux siècles. Mais si, en 1751, l'excès de mortalité infantile masculine (par rapport à la mortalité des fillettes) était estimé à 10 %, il est passé à plus de 30 % au cours des années 1970. Depuis cette date, l'incidence des décès de jeunes garçons a diminué, tendant à se rapprocher de celle des filles dans les 15 pays développés analysés par le Dr Devenstedt (Philadelphie).
Les auteurs expliquent que la baisse globale de la mortalité a été rendue possible par une meilleure détection de pathologies infectieuses, par une majoration du nombre des naissances intra-hospitalières (passant de moins de 5 % aux Etats-Unis en 1900 à 99 % en 1963), par des progrès en termes de néonatalogie et par une meilleure alimentation (qui, à elle seule, pourrait expliquer une baisse de 40 % de la mortalité en Grande-Bretagne entre 1800 et 1980). Pendant la période néonatale, les jeunes garçons ont un risque plus élevé de décès que les filles, quelle qu'en soit la cause. La baisse de décès néonatals en rapport avec l'évolution d'une pathologie infectieuse a affecté les deux sexes de façon différente.
La réponse immunitaire des filles.
La réponse immunitaire des filles et leur résistance aux infections sont en effet plus importantes que celles des garçons. Cette particularité existe dès la phase utérine puisque la production de stéroïdes d'origine gonadique diffère et que les enfants de sexe masculin ont une tendance plus importante à la prématurité et aux troubles de la fonction respiratoire au cours de la période néonatale. C'est cette tendance plus marquée des garçons à souffrir de maladies potentiellement graves dans les suites de la naissance qui pourrait expliquer l'augmentation de l'écart de mortalité observée entre les deux sexes jusque dans les années 1970. L'amélioration des pratiques de médecine néonatale et la prise en charge adaptée des pathologies infectieuses ont permis de combler le retard des garçons en termes de survie infantile depuis cette date. Les auteurs rejettent formellement l'hypothèse de désintérêt de la médecine pour les naissances de sexe masculin qui auraient pu conduire à une moins bonne prise en charge des garçons à leur naissance.
La plus grande fragilité des garçons à la naissance et un meilleur taux de survie des bébés les plus à risque (notamment des prématurés de petit poids) pourraient contribuer dans les années à venir à un déséquilibre en termes de mortalité à l'âge adulte, en raison des conséquences à long terme de leur pathologie initiale. On sait en effet que les enfants prématurés ont un risque majoré de pathologie pulmonaire à l'âge adulte, et que le risque cardio-vasculaire est, lui aussi, majoré dans cette population. Enfin, les auteurs concluent que la meilleure prise en charge néonatale pourrait avoir diminué la pression de sélection vis-à-vis des génotypes les plus vulnérables et que, par la suite, l'expression des gènes puisse conduire à une majoration de la différence en termes de longévité entre les hommes et les femmes.
« Proc Natl Acad Sci USA », édition avancée.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature