Macron à la recherche d'une alternative à l'Amérique

La Chine, notre nouvel allié ?

Par
Publié le 11/01/2018
Article réservé aux abonnés
La Chine, notre nouvel allié ?

La Chine, notre nouvel allié ?
Crédit photo : AFP

Le président français va plus vite que la musique. Dès son arrivée sur le territoire chinois, il a envisagé une alliance entre la France, l'Europe et la Chine pour mettre en œuvre l'accord sur le climat que le désistement américain met en péril. Il a trouvé des accents solennels pour démontrer que l'Europe et la Chine, étant la mémoire du monde, sont aussi son avenir. Il a encouragé les nouvelles routes de la soie proposées par Pékin tout en rappelant qu'elles ne pouvaient se limiter à une entreprise chinoise mais devaient résulter d'une coopération avec l'Europe.  

M. Macron n'a certes pas manqué de souligner les préoccupations en matière des droits de l'homme en Chine, mais, comme il devait conclure d'importants accords commerciaux, ses critiques ne risquaient pas d'avoir une influence durable. M. Xi a verrouillé la société chinoise en renforçant le contrôle du parti communiste et, si la Chine continue de croître à un rythme qui en fera la première puissance économique du monde dans deux ou trois décennies, l'autoritarisme du pouvoir ne risque pas d'en faire un paradis.

Le chef de l'État a fait ce qu'il a pu pour convaincre Donald Trump qu'il commettait une erreur historique en refusant de croire au réchauffement de la planète. Il n'est pas parvenu à persuader le président américain, qui a vu dans la vague de froid sur la côte Est des États-Unis la preuve absolue qu'il ne fait pas de plus en plus chaud sur la terre. Entre un Trump infantile et un Xi conquérant, le choix n'est pas facile et il n'est même pas sûr qu'il faille choisir. La nature du régime chinois n'empêche pas de faire des affaires avec la Chine et c'est tout ce que peut espérer la diplomatie française qui, en Asie, assiste, impuissante, à un conflit entre deux impérialismes, celui de Pékin, de plus en plus triomphant, et celui de Washington, de plus en plus incohérent. Il demeure que le commerce avec la Chine est freiné par l'absence de réciprocité : Pékin est libéral pour ses exportations, protectionniste pour ses importations et il faudra du temps pour amener les Chinois à plus d'impartialité. Pour le moment, nous accusons un déficit annuel de quelque 30 milliards d'euros dans nos échanges avec l'Empire du milieu.

L'absence de l'Allemagne

M. Macron a tenté d'associer l'Europe à sa vision des relations avec la Chine, sans sembler savoir que l'Allemagne traverse une crise politique sévère depuis les élections législatives de septembre dernier qui ont rendu apparemment impossible la formation d'un gouvernement de coalition. La chancelière Angela Merkel s'efforce de trouver une solution dans la reconduite d'un gouvernement associant les conservateurs, arrivés en tête des résultats, et les sociaux-démocrates, lesquels ne sont pas vraiment enthousiastes, dès lors que leur précédente expérience de cohabitation avec la CDU, le parti de Mme Merkel, a entraîné l'affaiblissement de leur parti. 

Au fond, M. Macron bout d'impatience. Il aimerait bien que les Allemands trouvent une issue. Mais leur problème n'est pas un incident de parcours. Il traduit une défiance à l'égard de la CDU depuis que Mme Merkel a accepté d'accueillir massivement des immigrés, ce qui s'est traduit par l'arrivée au Bundestag de quelque 90 députés de la droite extrême et a suffi à compliquer le jeu entre les partis de gouvernement. Même quand elle aura surmonté ses difficultés actuelles, Mme Merkel ne sera pas libre de faire la politique de son choix. En tout cas, elle ne sera pas disposée à participer au projet de M. Macron d'ouvrir les bras à la Chine, d'autant qu'elle ne souffre guère d'un déficit commercial avec ce pays. 

En d'autres termes, le volet chinois de la diplomatie française n'est pour l'instant qu'embryonnaire. Il existe d'autres urgences, plus impératives, comme la remise sur pied de l'Europe après que l'Allemagne aura retrouvé sa stabilité politique. La politique imaginée par M. Macron serait bien plus convaincante s'il avait réussi à réduire davantage les déficits publics et mis la France sur un pied d'égalité avec l'Allemagne.

 

Richard Liscia

Source : Le Quotidien du médecin: 9630