Le microbiote fongique pourrait jouer un rôle dans l’obésité

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Publié le 13/10/2017

« Il nous faut vraiment examiner tous les microbes et déterminer comment ils interagissent les uns avec les autres afin d’obtenir un tableau complet de la structure et des fonctions du microbiome chez un individu donné », souligne dans un communiqué le Dr Cheryl Gale, professeur de pédiatrie à l’université du Minnesota à Minneapolis, qui a dirigé l’étude publiée dans le journal « mSphere » de l’American Society for Microbiology.

Selon cette étude, une alimentation grasse obésogénique modifie la composante bactérienne mais aussi la composante fongique du microbiote intestinal, ainsi que les interactions bactéries/champignons impliquées dans le métabolisme.

Diminuer la satiété ou accentuer la faim

Les recherches récentes ont montré qu’une alimentation riche en graisses modifie le microbiote bactérien peuplant l’intestin. En outre, le microbiote intestinal résultant d’un régime gras favorise le développement de l’obésité et de ses troubles associés tels que diabète et athérosclérose ; plusieurs mécanismes ont été proposés pour expliquer cet effet : ce microbiote « gras » pourrait extraire plus d’énergie de l’alimentation, produire des neurofacteurs diminuant la satiété ou accentuant la faim, et pourrait induire une inflammation systémique.

Mais le microbiote fongique, ou mycobiote, pourrait-il aussi jouer un rôle dans l’obésité ? La communauté des champignons (levures incluses) peuplant l’intestin, peu étudiée jusqu’ici, suscite un intérêt croissant : elle peut être influencée par l’alimentation et elle peut affecter l’inflammation intestinale.

Dans une étude chez la souris, Heisel et coll. ont examiné pour la première fois comment un régime gras affecte la composante fongique de l’intestin, en plus de la composante bactérienne. Des souris nourries avec un régime gras (60 % des calories venant des graisses) ont été comparées à des souris sous régime standard (choux et 18 % des calories venant des graisses). Sans surprise, les souris sous régime gras sont devenues obèses.

Les chercheurs ont constaté que le régime gras affecte aussi bien le microbiote bactérien que le microbiote fongique, modifiant l’abondance de 19 taxons bactériens (positivement ou négativement) et réduisant l’abondance de 6 taxons fongiques (genres Alternaria, Saccharomyces, Septoriella, Tilletiopsis ; et S. cerevisiae, T. washingtonensis). Alors que les champignons apportés par le choux alimentaire contribuent très peu au microbiote fongique des souris.
Il est intéressant de noter que l’espèce fongique S. cerevisiae est moins abondante chez les souris sous régime gras ; ce champignon pourrait peut-être en effet favoriser la santé métabolique, puisque dans de précédentes études l’administration de S. boulardii (vivants), une levure probiotique semblable à S. cerevisiae, s’est montrée prévenir l’obésité chez des souris soumises à un régime gras.

Des liens entre champignons et bactéries

Les chercheurs ont identifié des corrélations de co-abondance entre certains champignons et certaines bactéries, et ces correlations sont significativement réduites chez les souris sous régime gras, notamment les correlations champignons/bactéries. De plus, les modules fonctionnels liés au métabolisme énergétique sont moins abondants chez les souris sous régime gras.

« Non seulement nous affectons la communauté des champignons avec des changements alimentaires, mais nous constatons aussi que les relations entre champignons et bactéries se modifient également, précise le Dr Gale. Ces règnes ne sont pas isolés. Si l’un change, cela affecte également la structure et peut-être la structure fonctionnelle des autres règnes. »

Ces résultats plaident donc pour mieux étudier le microbiote fongique et ses interactions avec les autres communautés microbiennes. Ceci pourrait permettre de découvrir de nouvelles cibles pour traiter et prévenir l’obésité.

mSphere, journal of the American Society for Microbiology, Timothy Heisel et coll., 12 octobre 2017

Dr Veronique Nguyen

Source : lequotidiendumedecin.fr