Les certificats de non contre-indication à la pratique sportive, mode d’emploi

L’ECG n’est ni assez sensible ni assez spécifique

Publié le 07/04/2014
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

« Ces certificats en l’état servent surtout à protéger les clubs en cas d’accident de santé de leurs affiliés… », souligne le Dr Yves Abitteboul, médecin du sport à Cahors.

Pour mettre à l’abri les candidats à la pratique sportive et éventuellement leur médecin, un certificat de non contre-indication à la pratique sportive (CMNCIS) doit conclure un interrogatoire rigoureux, un examen clinique soigneux et, aujourd’hui, selon les recommandations, au moins de la Société française de cardiologie (SFC) et son équivalent européen (l’ESC), un électrocardiogramme (ECG) de repos, dans l’espoir de repérer les sportifs à risque de mort subite (MS), l’accident par définition le plus définitif.

La Haute Autorité de Santé ne s’étant pas engagée sur ce point, faute d’étude convaincante sur l’intérêt d’un ECG de repos, chacun peut rester juge en conscience de l’opportunité de l’examen… Il s’agit d’un acte médical à part entière, qui doit être réalisé dans des conditions conformes aux données de la science, un acte à haut risque qui engage la responsabilité civile, pénale et disciplinaire. « Le CMNCIS est aussi l’occasion pour le médecin de famille, souvent la seule, à l’âge de l’adolescence notamment, de contrôler poids et taille, statut vaccinal, d’évoquer les conduites à risque, etc. », rappelle le Dr Abitteboul.

À ce jour donc, pour toute demande de certificat en vue d’une compétition et pour une première licence, un ECG de repos est conseillé tous les trois ans de 12 à 20 ans, puis tous les 5 ans jusqu’à 35 ans. Au-delà, l’indication d’un ECG d’effort est envisagée.

Moins de morts subites chez les femmes

Or, l’expérience l’a montré, l’ECG (qui doit être correctement interprété ! le médecin qui s’y est aventuré et n’a pas vu une anomalie risque sans doute davantage que ne pas avoir demandé l’examen) n’est ni suffisamment sensible ni spécifique, obligeant en cas d’anomalie à des explorations complémentaires souvent inutiles et coûteuses. L’ECG protégerait sans doute mieux les plus jeunes athlètes (bien qu’une faible proportion seulement de cardiopathies se voie à l’ECG) et les personnes souffrant de troubles du rythme. L’origine de la plupart des MS est encore inexpliquée. « Une stratégie plus "payante" serait que les frères et sœurs de MS soient systématiquement explorés, ce qui est le cas d’une famille sur quatre seulement », regrette le Pr Xavier Jouven, cardiologue et spécialiste de la MS du sportif à l’Hôpital européen Georges Pompidou (Paris).

Une certitude, à l’étude de l’Observatoire français de la MS (toutes les MS, du sportif du dimanche comme du compétiteur), les femmes font exceptionnellement une MS, alors même qu’elles pratiquent autant, vélo, course ou natation préférentiellement. « Il paraît donc inutile de les soumettre obligatoirement à cet examen », observe-t-il. L’indication d’examens complémentaires devrait être modulée en fonction des risques.

Les pistes explorées par les ministères concernés pour simplifier les démarches « sésames » de l’accès au sport sont encore en chantier : un CMNCIS tous les trois ans avant 40 ans, tous les deux ans ensuite pour les sportifs « majeurs » ; certificats multisports d’emblée (les CI à certains sports étant précisées ; entre deux CMNCIS, un autoquestionnaire (10 items)… dont le traitement effraie déjà les grosses Fédérations ; un certificat de moins de 3 ans assorti d’un autoquestionnaire pour les sportifs non licenciés qui participeraient possiblement à des compétitions, etc.

Dr Brigitte Blond

Source : Le Quotidien du Médecin: 9316