En Belgique, le coaching périnatal

Les étudiants sages-femmes au chevet de la pauvreté

Publié le 08/01/2018
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Crédit photo : Benjamin Leclercq

Le programme Een buddy bij de wieg (« Un pote au berceau », en flamand), inventé en 2008 par la Arteveldehogeschool, une école de Gant (Flandres), est conçu comme un coaching périnatal. L'étudiant suit une femme enceinte du début de sa grossesse jusqu'au premier anniversaire du bébé.

En Belgique, les études de sage-femme durent trois ans post-bac. Pour l'étudiant volontaire, le programme débute en deuxième année et se termine en troisième. La relation ainsi tissée n'est cependant pas médicale, mais bien « amicale ». « L'étudiant n'est pas là en tant que professionnel. Il n'a aucune responsabilité médicale, ne réalise pas d'acte. L'objectif est davantage social : rompre l'isolement, parler, aider au quotidien, préparer matériellement l'arrivée du bébé, etc. », souligne Joeri Vermeulen, directeur du département sage-femme de l'école Erasme. Pour cette première année, sept étudiantes se sont portées volontaires, et couvrent la région de Asse, au nord-ouest de la capitale, où des médecins locaux ont servi de relai.

« Accompagner sans juger » 

Concrètement, l'étudiant vient à domicile au minimum une fois toutes les deux semaines. Un contact téléphonique ou électronique hebdomadaire est également requis. En amont, un séminaire sur la grossesse en milieu précaire apporte les bases théoriques aux étudiants. Ceux-ci ne sont pas livrés à eux-mêmes. Tous les quinze jours, des sages-femmes et des médecins de l'Office de la naissance et de l'enfance (ONE), une agence gouvernementale, animent une séance de réflexion et d'échange pour débriefer l'expérience terrain. « Nous leur apprenons à mettre des limites et à accompagner sans juger », témoigne Joeri Vermeulen. L'intérêt est double. D'abord, bien sûr, aider des femmes vulnérables. « Les études montrent que le niveau de revenus a une influence sur les naissances prématurées, la mortalité périnatale ou les anomalies fœtales. Chez les personnes en situation de précarité, le chômage - ou à l'inverse un emploi pénible et physique ; la consommation d'alcool et de tabac ; un cadre de vie détérioré ou encore un manque de suivi sont autant de facteurs d'une grossesse compliquée », explique Joeri Vermeulen. Ensuite, il s'agit de sensibiliser les étudiants. « La pauvreté, à l'hôpital, ne se voit pas forcément. Il faut aller chez les gens, les rencontrer dans leur cadre de vie, pour saisir leur logique et leur contraintes », plaide Véronique Laureys, sage-femme et professeure à la Arteveldehogeschool. L'école de Gant, qui forme aujourd'hui les autres écoles belges désireuses d'adopter ce programme, a déjà accompagné quelque 197 familles. « On constate que les étudiants gagnent en empathie. Ils comprennent pourquoi certaines femmes ont tant de mal à honorer un rendez-vous : au regard de leur quotidien, la consultation n'est pas une priorité ; ils savent désormais que même le prix du ticket de bus peut-être un obstacle », poursuit la sage-femme. Résultat, « des sages-femmes plus réceptives et attentives une fois en poste à l'hôpital ».

De notre correspondant Benjamin Leclercq

Source : Le Quotidien du médecin: 9629