Les médecins bientôt autorisés à faire de la pub ? Le Conseil d'État défend une libre communication

Publié le 21/06/2018
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Crédit photo : PHANIE

L'interdiction de publicité, imposée aux médecins depuis plus de 70 ans, trop stricte, doit être remplacée par un droit à une communication libre avec le public, tant qu'elle n'est pas commerciale, estime le Conseil d'État.

Cette évolution est proposée dans une étude sur les "Règles applicables aux professionnels de santé en matière d'information et de publicité" publiée jeudi par le Conseil d'État. « La réglementation interdisant la publicité directe ou indirecte aux professions de santé est susceptible d’être affectée par l’évolution de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, qui a jugé, dans un arrêt récent, qu’une prohibition générale et absolue de la publicité relative à des prestations de soins est contraire au Traité », affirme aujourd'hui le Conseil d'État. 

Le groupe de travail, présidé par Yves Doutriaux, souhaite accorder ce droit de communication aux professions de santé dotées d'un ordre professionnel, donc d'une autorité disciplinaire : médecins, chirurgiens-dentistes, infirmiers, sages-femmes, pédicures-podologues, masseurs-kinésithérapeutes, pharmaciens (qui ont déjà le droit de faire de la publicité pour la parapharmacie, mais ne pourront toujours pas en faire pour les médicaments).

L'interdiction de faire de la "réclame" pour les médecins remonte au moins à 1947.

L'évolution de réglementation serait rendue nécessaire par les évolutions technologiques et des usages des patients. « L’essor rapide de l’économie numérique a rendu obsolètes certaines des restrictions actuelles en matière d’information tandis que les praticiens peinent à maîtriser leur e réputation et que de plus en plus de patients recherchent des informations sur l’offre de soins sur Internet et les réseaux sociaux, tout en doutant parfois de leur pertinence », estime encore le Conseil d'État.

À l'heure d'Internet et des réseaux sociaux, le public à des « attentes légitimes » en matière de santé, argumente Yves Doutriaux. Les patients veulent en savoir plus sur le professionnel de santé avant de prendre rendez-vous : quels actes il pratique habituellement, quelle est son expérience, combien coûte la consultation, combien reste à charge...

« Les gens vont sur Google pour se renseigner tout en se méfiant des résultats », remarque le conseiller d’État. Et « selon une étude récente, 35 % des personnes âgées de moins de 35 ans, et 26 % de l'ensemble de celles susceptibles d'être soignées renonceraient aux soins, faute de savoir à qui s'adresser ou comment s'orienter ».

Ne pas laisser faire n'importe quoi

« Pour autant, tout ne doit pas être possible. Il ne faudrait pas, sous prétexte de suppression de l'interdiction de la publicité pour ces professions, que l'on puisse faire n'importe quoi », explique Yves Doutriaux.

Cette liberté de communiquer, si elle est adoptée, s'accompagnera de l'interdiction d'exercer la profession comme un commerce, conformément à la déontologie médicale consacrée par le droit français et européen. 

Pas question donc d'« auto-proclamation » non vérifiée de spécialités ou de parcours professionnel. « La communication du professionnel de santé devra, entre autres, être loyale, honnête, ne faire état que de données confirmées et s'abstenir de citer des témoignages de tiers », comme des anciens patients.

Les ordres dresseront un « menu déroulant limitatif » des précisions que le professionnel pourra apporter sur ses spécialités et "sur-spécialités".

L'information économique (honoraires, mode de paiement, reste à charge...), déjà censée être affichée dans les salles d'attente, sera également obligatoire sur tout support (site Internet, répondeur téléphonique, secrétariat électronique, etc.) et consultable avant rendez-vous. 

Avec AFP


Source : lequotidiendumedecin.fr